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forme en quelque sorte un étage inférieur, et s’exploite deux fois pendant le même laps de temps. Quoique la principale fonction de celle-ci soit surtout de couvrir le terrain, elle donne néanmoins des produits fort considérables, qui augmentent sensiblement le revenu de la forêt. Ce système, d’une application fort simple, est donc un pas de plus dans la voie du progrès, un procédé de culture plus intensif et plus perfectionné, qui à ce titre devrait être plus répandu.

Ce point n’est pas le seul à l’égard duquel les Allemands nous sont supérieurs. Ils n’ont pas toujours, il est vrai, l’esprit très pratique ; mais en ce qui concerne les forêts ils sont plus praticiens, ce qui n’est pas tout à fait la même chose. L’exécution des repeuplemens artificiels notamment est arrivée chez eux à un très haut point de perfection, et l’ouvrage de M. Pfeil est là pour nous en convaincre. Son chapitre des semis et des plantations est certainement un des plus complets de son livre, et à coup sûr le plus intéressant pour un lecteur français. L’exposé et la discussion des différentes méthodes employées dénotent chez l’auteur un grand sens pratique, un jugement très sûr, et surtout une vive pénétration de l’importance de son sujet. Il n’en est pas en effet qui soit plus digne de l’attention du sylviculteur. Les repeuplemens artificiels sont indispensables à la conservation des taillis, qui, ne se reproduisant que par rejets, finiraient infailliblement par se détériorer, si des plantations nouvelles ne venaient de temps à autre remplacer les souches épuisées. D’un autre côté, quoique le traitement des futaies repose sur la régénération naturelle de ces massifs, il arrive souvent que le but n’est pas atteint d’une manière complète, et qu’il faut recourir à des moyens artificiels pour achever l’œuvre de la nature. Ce sont des clairières à repeupler, des vides à reboiser, des essences nouvelles à introduire, travaux difficiles et minutieux dans lesquels les Allemands, il faut le reconnaître, nous laissent bien loin derrière eux. Il en est de même des soins qu’ils donnent à leurs forêts pour remédier aux dommages causés par la gelée, le givre, les insectes, le gibier. Tandis qu’en France nous laissons en général agir la nature, que nous reculons devant une dépense souvent minime pour arrêter à ses débuts une invasion de chenilles, nous exposant ainsi à perdre l’accroissement de toute une année, les Allemands se montrent meilleurs calculateurs ; ils cherchent d’abord à prévenir le mal, et s’ils n’y parviennent, ils l’attaquent directement, et ils s’en trouvent bien.

Il est encore d’autres améliorations dont on pourrait certainement tirer grand profit et qui constitueraient un progrès réel ; de ce nombre seraient l’introduction et la culture, concurremment avec nos essences indigènes, de certaines essences exotiques. Nous n’avons guère en France que des bois communs, propres seulement au