Page:Revue des Deux Mondes - 1860 - tome 25.djvu/698

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

nambulisme artificiel, n’en sont pas les effets les plus singuliers. Outre ces phénomènes, il se produit souvent encore un développement particulier, une exaltation de la sensibilité, une surexcitation des facultés intellectuelles. C’est ici que nous entrons dans le domaine de ce que l’on a appelé le merveilleux du magnétisme.

Depuis longtemps, on avait constaté chez les hystériques des effets nerveux du même ordre que ceux qu’on rapporte au sommeil magnétique. Le vulgaire, toujours disposé à faire intervenir le surnaturel pour expliquer ce qui sort des phénomènes qui lui sont familiers, voyait, comme les magnétiseurs, du merveilleux dans tous ces effets. L’hystérie est assurément l’une des maladies les plus bizarres qui se puissent rencontrer. La personne qui en est attaquée passe tour à tour d’un état d’anéantissement total, dont l’apparence peut être même celle de la mort, à une surexcitation prodigieuse qui imprime aux sens un degré de finesse et d’acuité inconnu dans l’état normal. Chez les éthérisés mêmes, certains sens, avant d’être engourdis, passent aussi par une période de surexcitation. L’ouïe par exemple, comme l’a observé le professeur Gerdy, assez émoussée déjà pour ne plus percevoir les mots articulés, entend cependant les sons avec un retentissement qui en double et triple l’intensité. Le bruit le plus léger faisait éprouver à la somnambule cataleptique décrite par M. Le docteur Puel une sorte de secousse électrique. Ce développement soudain et inaccoutumé de la sensibilité nerveuse a été pris pour un don particulier. On a supposé que ces hystériques étaient inspirés par les esprits ou lutines par le démon. Comme il leur suffisait de la plus légère sensation pour être avertis de la présence d’une personne ou d’un objet, comme leur ouïe et leur vue s’étendaient fort loin, on admettait qu’ils étaient doués d’une véritable divination, d’une vertu prophétique. Ce qui confirmait les esprits superstitieux dans cette opinion, c’est que les malades, durant leur accès, montrent une puissance de mémoire, une facilité et une clarté d’élocution tout à fait extraordinaires. En proie à des hallucinations, à des visions habituellement en rapport avec les idées qui les préoccupent, ou provoqués par les sensations internes et bizarres qui se produisent chez eux, ils racontent d’un ton inspiré et convaincu ce qu’ils ont vu pendant leur délire, et ces récits étaient jadis acceptés comme autant de révélations. Les chroniqueurs et les annalistes du moyen âge sont remplis de faits de cette sorte, que l’on retrouve également dans l’antiquité et chez les peuples sauvages. L’intelligence est dans une si étroite dépendance du système nerveux que des troubles profonds n’affectent jamais celui-ci sans qu’un délire, presque toujours associé au développement excessif de certaines facultés intellectuelles, ne se produise consé-