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leurs lois actuelles leur facilitent toutes les formes de rassociation. Un fort apprentissage libéral doit sortir de ce nouveau régime économique. En effet, les intérêts industriels, stimulés sans relâche par la concurrence étrangère, seront obligés d’être attentifs aux gênes arbitraires et artificielles, administratives ou politiques, qui entraveront leur développement, d’être hardis et prompts à demander la réforme des abus qui obstrueraient leur marche. Les libertés politiques, la liberté d’association et de réunion pour se concerter sur des intérêts collectifs, la liberté de la presse pour s’éclairer, réclamer, se plaindre, sont au bout de cette voie. L’état lui-même, en renonçant à la routine dans l’établissement du budget des recettes, en mettant le premier au jeu, puisqu’il s’expose tout d’abord à sacrifier une partie de son revenu, en ouvrant le champ des expériences en matière de taxation, s’impose la nécessité d’être courageux, instruit, avisé dans la confection de ses budgets, et il sera le premier intéressé à laisser pénétrer dans les arcanes des finances publiques les débats investigateurs de l’opinion. Croyons à la solidarité des libertés, demandons les libertés politiques pour faire réussir les libertés commerciales, espérons du moins que le succès des unes hâtera le progrès des autres.

Parmi les articles britanniques qui ne rencontrent point encore de concurrence sur notre marché, et dont la libre importation est un incontestable profit pour nous, il faut compter en première ligne cette catégorie de produits immatériels qui s’appellent discussions de la presse et des chambres anglaises. On attendait cette année de ce côté de la Manche, avec une curiosité plus vive que d’habitude, l’ouverture du parlement. L’on avait hâte en effet de connaître quelque chose de précis sur le traité de commerce qui, la veille même du jour où le parlement se rassemblait, avait été signé à Paris. L’on désirait connaître la nature et la portée de l’accord qui peut régner entre la France et l’Angleterre au sujet des affaires d’Italie. La curiosité n’a pas jusqu’à présent été entièrement satisfaite, au moins sur le premier de ces points.

Le traité a été annoncé sans doute ; mais il ne pourra être soumis au parlement qu’après l’échange des ratifications. L’effet du traité devant d’ailleurs produire des altérations importantes dans quelques branches du revenu, le chancelier de l’échiquier, M. Gladstone, soumettra à la chambre des communes l’ensemble de son budget en même temps que le traité. Il a annoncé pour le 6 février cette double présentation. En attendant les révélations officielles, nous pensons être suffisamment renseignés sur le caractère général du traité. Du côté de la France, les prohibitions sont entièrement abandonnées : la fixation des nouveaux droits ou les dégrèvemens portent sur tous les articles manufacturés qui figurent dans notre tarif ; le principe admis pour la tarification nouvelle est celui que Huskisson avait inauguré pour l’Angleterre en 1825, à savoir que le maximum des droits protecteurs ne dépassera pas, le double décime compris, 30 pour 100 de la valeur des marchandises. Une seule exception est faite à ce principe, en ce qui concerne les fers forgés, qui paieront, double décime compris, 70 francs par tonne. Les droits seront fixés, conformément à ce maximum de 30 pour 100, dans un traité ultérieur. En 1864, le maximum de la protection sera réduit à 25 pour 100, et le droit sur les fers à 60 francs. Quant aux négociateurs an-