Page:Revue des Deux Mondes - 1860 - tome 26.djvu/26

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

et par Jean de Médicis, n’eurent pas de peine à enlever en y surprenant la faible troupe que l’amiral y avait aventurée. Après l’échec et la prise de Robecco, il ne restait plus aux Français, sur la rive gauche du Tessin, que la ville d’Abbiate-Grasso. Afin de les déloger de cette position, les confédérés passèrent le fleuve un peu en dessous avec des forces supérieures, et ne laissèrent dans Milan que six mille hommes, suffisans pour mettre la ville à l’abri d’une attaque. Ils s’établirent à Gambolo, s’emparèrent du château de Garlasco, et menacèrent de couper les vivres que Bonnivet tirait de la Lomelline.

Bonnivet était comme enfermé à Abbiate-Grasso. Pendant longtemps il avait fait espérer au roi son maître la soumission prochaine du Milanais[1] ; mais depuis qu’il avait commencé à revenir sur ses pas, il lui avait demandé des renforts avec lesquels il put reprendre l’offensive. Il attendait cinq mille Grisons, qui, descendus de leurs vallées sous la conduite de Dietingen de Salis, devaient se réunir vers Lodi à Federico da Bozzolo, et opérer une utile diversion entre l’Adda et Milan. François Ier, entretenu dans la confiance d’un succès décisif en Italie, apprit presque en même temps la position périlleuse où était son favori Bonnivet et les avantages que son ennemi Charles-Quint venait de remporter sur la frontière des Pyrénées.

L’empereur, que le manque d’argent et de troupes avait empêché de pénétrer en France dans l’automne de 1523, n’avait rien négligé pour remettre son armée sur pied. Afin de la renforcer et de la mouvoir, il avait cherché partout de l’argent. Outre celui qu’il avait obtenu des cortès de Palencia, qu’il avait réclamé des ordres militaires de chevalerie, qu’il avait tiré de la cruzade et de l’église, il avait pris toutes les sommes venues des Indes, et dont la plus grande partie était destinée à ses sujets. Il avait écrit à l’archiduc Ferdinand, son vicaire-général dans l’empire, pour qu’il en obtînt de la ligue de Souabe et de l’opulent clergé d’Allemagne. Il lui disait qu’il ne pouvait songer à repousser les entreprises des Turcs du côté du Danube qu’après avoir arrêté celles des Français en Italie, qu’il avait déjà dépensé des quantités innombrables de deniers, qu’il en avait besoin encore, afin de lever de grosses armées de gens de pied et de cheval, et qu’il requérait les Allemands de l’y aider, comme ils y étaient tenus par intérêt et par devoir. Il recommandait en même temps à son frère de faire procéder par la chambre impériale contre le roi François Ier comme usurpateur du royaume d’Arles, « et de faire prononcer la confiscation du Dauphiné, de la Provence, du

  1. «… Vous espérez dans huit jours après vostre dite lettre de faire parler aultre langage ceulx qui sont dedans Milan et de mectre icelle ville en mon obéissance… » — Lettre de François Ier du 27 octobre 1523. — Mss. Baluze, f. 180.