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deux bras, dont le principal longeait Pavie, et dont le moindre, le Gravalono, décrivait une courbe assez spacieuse. Entre leur séparation au-dessus de la ville et leur jonction au-dessous, ces deux bras formaient une île où se trouvait le faubourg Saint-Antoine, qu’unissait à Pavie un pont de pierre couvert d’une galerie et défendu par une tour. Au nord de la place, en face de la citadelle et du côté de Milan, s’étendait le fameux parc de Mirabello, dont le nom même indiquait le site et l’agrément. Le parc de Mirabello, embrassant un espace d’environ dix mille carrés, entouré d’une épaisse muraille qui le fermait des quatre côtés et dans laquelle étaient pratiquées des portes à pont-levis, descendait presque jusqu’à Pavie. C’était un magnifique lieu où les anciens ducs de Milan allaient demeurer dans la belle saison et prendre les plaisirs de la chasse. La résidence ducale de Mirabello était ornée comme un palais, fortifiée comme un château, et son vaste parc, rempli de bois, couvert de prairies, traversé de cours d’eau, et où se livra quatre mois après la fameuse bataille du 24 février, offrait une certaine variété d’aspects et divers accidens de terrain.

Pavie, qui avait au sud les deux bras du Tessin et au nord la citadelle confinant presque au parc de Mirabello, était moins bien protégée du côté de l’ouest, tourné vers Alexandrie. Le Tessin, avant de se courber et de diviser ses eaux, y coulait à une assez grande distance de son enceinte. Entre les rives du fleuve et ses murailles s’élevaient, en s’échelonnant, la belle abbaye de San-Lanfranco, l’église de San-Salvator, entourée d’habitations, et le Borgaretto. L’armée française pouvait attaquer par là Pavie commodément et avec avantage, en ayant, il est vrai, le Tessin à dos, mais longtemps sans danger. Du côté de l’est, au-delà de la muraille du parc et des fortifications de la ville, s’étendaient des monticules et des vallons qu’occupaient les abbayes et les églises de San-Paolo, Santo-Spirito, San-Giacomo, San-Pietro-in-Verzolo, Sant’Appollinari, et descendaient à peu de distance les uns des autres des cours d’eau plus ou moins profonds, tels que la Vernavola, l’Olona et le Lambro, qui couraient se jeter dans le Tessin ou dans le Pô.

La ville devant laquelle allait se décider le sort de l’Italie[1] était défendue par un capitaine déjà éprouvé, et que ses fortes qualités militaires réservaient à une plus haute fortune. Antonio de Leyva s’y était enfermé avec cinq mille lansquenets allemands, cinq cents arquebusiers espagnols, trois cents hommes d’armes et deux

  1. Il y a une relation très circonstanciée et très exacte du siège de Pavie par Tœgius, médecin et chevalier. Elle a pour titre : Francisci Tœgii physici et equitis candida et vera narratio dires ac cronicœ Papiœ obsidionis. — Cette relation, fort rare, et dont je me suis beaucoup servi, est dans un volume de la bibliothèque Mazarine, sous le n° 17,512, et y forme le 5e traita de la p. 286 à 308.