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enseignement, il en faut conclure que les études qui se faisaient à cette académie embrassaient à peu près l’universalité des sciences qui de près ou de loin intéressent les beaux-arts, c’est-à-dire, d’après l’opinion bien souvent exprimée par Léonard lui-même, tout, à l’exception de la théologie, de la philosophie et du droit.

Il est probable que c’est le Traité de la Peinture, le plus considérable de ses ouvrages et le seul qui ait été publié dans son entier, qui formait le cadre général de son enseignement. Ses traités spéciaux, en partie perdus, en partie conservés manuscrits à Paris, à Milan et à Londres, étaient destinés à le compléter en développant les principaux sujets qui se rattachent aux arts du dessin. À plusieurs reprises, dans son Traité de la Peinture, Léonard lui-même parle des ouvrages qu’il avait écrits ou qu’il se proposait d’écrire. C’est ainsi qu’il mentionne un Traité de la Lumière et des Ombres, dont on possède le manuscrit, qu’il commença le 23 avril 1490. Il travaillait en 1498 à un Traité du Mouvement local, dans lequel il s’occupait du repos, du mouvement et de la pondération du corps humain. Il avait commencé un ouvrage qui devait être d’une grande importance sous ce titre : De la Théorie et de la Pratique. Léonard mentionne encore un Traité des Mouvemens de l’homme et un autre sur les Proportions du corps humain, dont il nous reste un fragment où il donne les mesures de la tête. Cette idée de l’harmonie entre les différentes parties du corps humain, cette divine proportion, comme il l’appelle, semble l’avoir tout particulièrement préoccupé. C’est la perfection de l’art qu’il se reproche de n’avoir pas atteinte, quoiqu’il ait sans cesse dirigé ses efforts vers ce but. « Admirateur des anciens et leur élève reconnaissant, — lit-on dans sa propre épitaphe, que le poète Platino Piatto avait faite de son vivant et probablement à sa demande, — une seule chose m’a manqué, leur science des proportions : j’ai fait ce que j’ai pu. Que la postérité me pardonne[1] ! »

Vasari et Benvenuto Cellini parlent également d’un Traité de Perspective qui aurait formé l’introduction de tous ses ouvrages sur la peinture, et dont Benvenuto assure même avoir possédé une copie. On sait que Léonard avait étudié l’anatomie à Pavie sous le savant Marco-Antonio della Torre. Il faisait même des dessins au crayon rouge qu’il retouchait à la plume d’après ses dissections[2]. Il rédigeait les leçons du professeur en les développant et en les commentant,

  1.  : : Mirator veterum discipulusque memor,
    Defuit una mihi symmetria prises, peregi
    Quod potui. Veniam da mihi, posteritas !
  2. Lomazzo mentionna encore un ensemble de dessins pour enseigner l’emploi de toute espèce d’armes, et les plans ou projets de trente moulins d’usages différens.