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Godwin, de Kenny Meadows, qui devait plus tard illustrer Shakspeare, de l’acteur William Elton et de l’artiste Edward Chatfield. Ce club se greffa plus tard sur une autre société d’élite, le Shakspeare Club, dont étaient Charles Dickens, Justice Talfourd, Daniel Maclise et Macready. Parmi les associations littéraires plus modernes qui résistèrent au système envahissant des club houses, je citerai encore le Museum Club, le Hooks and eyes et enfin Our Club (notre club). Douglas Jerrold était l’âme, la vie, le soleil de ces réunions intimes. Le grand humoriste n’aimait point les pompes des modernes établissemens de Pall-Mall, ni les domestiques en livrée. Dans une bonne taverne, avec de bons amis, il se trouvait plus à l’aise, plus chez lui et mieux inspiré. Là il brillait, dit un des membres du club, à chaque fois qu’on le touchait, comme fait la mer pendant la nuit. La plupart de ses âpres bons mots et de ses saillies bien connues ont étincelé dans ces clubs obscurs. Les modernes good fellows ont un peu conservé la manie de leurs ancêtres pour les repas de corps et les dîners d’anniversaires. Un jour qu’on proposait devant lui un de ces festins commémoratifs, Douglas Jerrold, las de semblables réunions de table, s’écria : « Si demain un tremblement de terre engouffrait l’Angleterre, les Anglais trouveraient moyen de se réunir et de dîner ensemble quelque part au milieu des débris, ne fût-ce que pour célébrer l’événement. »

On parle aussi d’un club qui existait il y a quelques années (1837) et qui existe peut-être encore à Londres, c’est le club des auteurs dramatiques siffleé (the Unsuccesful Club). Nul n’avait l’honneur d’être admis dans cette société qu’à la condition d’avoir essuyé un échec au théâtre. Plus cet échec d’ailleurs était notable, et meilleures étaient les chances pour le candidat. Si la pièce avait été retirée de l’affiche du spectacle après la seconde nuit, l’auteur devait être ballotté ; mais si sa comédie ou sa tragédie avait été sifflée durant les cinq actes, il était reçu par acclamation et pouvait commander aux frais du club tel dîner qui lui plaisait. Le président perpétuel portait un sifflet d’argent à sa boutonnière, comme étant les armes du club. Il se vantait de ce que durant les sept années de sa carrière dramatique l’œuvre la plus durable qu’il eût produite était un mélodrame qui avait fait dormir tout le monde. Fier, il comptait ses chutes comme un soldat ses blessures, et il espérait bien avec le temps mettre le public du parterre en furieuse humeur de briser les banquettes. D’autres clubs dramatiques se composent d’amateurs qui jouent entre eux des pièces de théâtre. Ces derniers, je l’avoue, recherchent plutôt les applaudissemens que les