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quelque part dans le royaume de Naples, et que Garibaldi, passant le phare, se mette à sa tête : il est difficile de croire que le roi de Naples puisse compter sur la fidélité ou l’énergie des troupes qu’il voudrait opposer à ses adversaires. La cour de Naples se voit ainsi réduite à l’extrémité fatale qu’on lui avait signalée depuis longtemps, et vers laquelle elle a marché avec une obstination et un aveuglement incompréhensibles. Voici aujourd’hui qu’elle se retourne vers les puissances occidentales, la France et l’Angleterre, dont elle a méprisé les persévérans conseils jusqu’à ce moment fatal en politique où les faits prononcent l’irrévocable et l’irréparable arrêt. La révolution des Deux-Siciles ne saurait à coup sûr être vue avec indifférence par les cabinets européens ; le spectacle d’une royauté légitime renversée a de quoi émouvoir les cours légitimistes. Le roi de Naples peut alléguer aussi comme excuse ou comme titre à la sympathie sa jeunesse. Il est certain en effet qu’il est surtout condamné à expier les fautes des autres, que son tort a été de conserver le régime établi par son père, et que ce tort même doit surtout être attribué à la reine douairière, dont la malheureuse influence s’est prolongée sur le nouveau règne. Si la position particulière du jeune roi de Naples peut être un titre à la sympathie privée, nous doutons qu’elle puisse être efficacement invoquée contre les considérations et les nécessités politiques en faveur desquelles les événemens paraissent devoir se prononcer. Il y a deux mois, nous signalions le comte d’Aquila, dont les tendances libérales sont connues, comme capable, si ce prince pouvait réussir à éloigner la reine douairière, de ramener la royauté napolitaine dans une voie de conservation et de sagesse ; mais peut-être était-il déjà trop tard il y a deux mois. Quoi qu’il en soit, le roi de Naples, chancelant même dans ses possessions de terre ferme, porte sa cause devant l’Europe, et charge un envoyé extraordinaire, le commandeur Martino, d’invoquer surtout la médiation de la France et de l’Angleterre.

La réponse des deux puissances occidentales est pour ainsi dire faite d’avance. Pour la connaître, nous n’avions pas besoin que lord Palmerston, avant même d’avoir reçu l’envoyé napolitain, se hâtât d’annoncer ses intentions à la chambre des communes avec une précipitation inconvenante et une légèreté presque sauvage. La réponse de la France et de l’Angleterre résulte en effet des engagemens antérieurs des deux puissances et de la nature des choses. Nous avons posé dans les affaires italiennes le principe de non-intervention : c’est dire que nous avons voulu que les affaires de l’Italie fussent réglées exclusivement entre Italiens, que les gouvernemens de la péninsule cessassent, dans leurs démêlés avec leurs peuples, de compter sur les interventions étrangères. — Mais, dit-on, si Garibaldi passe de Sicile en terre ferme, le roi de Naples sera renversé, et le royaume des Deux-Siciles sera annexé au Piémont. — Est-ce tout ? — Nullement. Après Naples, ce sera le tour des états pontificaux. — Est-ce la fin ? — Pas encore. Le mouvement unitaire, qui s’est déjà fortifié par l’annexion des états du centre, et qui est