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se montrer nulle part. Tout avait fléchi autour d’eux sous la terreur espagnole ; mais là se trouvèrent les inflexibles, qui relevèrent les autres.

L’église réformée aux Pays-Bas ne tarda donc point à devenir l’église nationale, et ce fut elle qui profita le plus de la victoire remportée par la cause de l’indépendance. Lorsque la lutte prit fin, elle était à peine numériquement la plus forte. Du moins il paraît prouvé que l’église catholique comptait encore un nombre presque égal d’adhérens ; mais l’église réformée avait si bien soutenu le poids et nourri le feu du combat, c’était si évidemment elle qui avait été l’âme de cette longue et glorieuse insurrection, que la nation nouvelle se trouva comme identifiée avec elle, et ce ne sont pas les privilèges qui lui furent accordés au détriment des autres sectes qui eussent réduit celles-ci à une impuissante minorité, si le prestige de l’église réformée ne les avait pas reléguées dans l’ombre. Aujourd’hui l’on compte en Hollande cinquante-sept mille luthériens ; mais beaucoup d’entre eux proviennent, soit d’émigrations forcées au XVIIe siècle, en particulier de la Belgique, soit de l’établissement volontaire de nombreux Allemands attirés par leurs intérêts dans ce pays de négoce. Quant aux baptistes ou mennonites (environ quarante-deux mille), qui se distinguent des autres protestans surtout parce qu’ils reculent le baptême jusqu’à l’âge adulte, ce sont les restes éminemment respectables et pacifiques des fougueux anabaptistes du XVIe siècle. Tous d’ailleurs n’avaient pas partagé le fanatisme de leurs frères, et, une fois l’explosion comprimée, leurs débris se reconstituèrent sous la direction d’un ancien prêtre, Menno Simons, de la Frise, homme d’une piété douce et pratique, dont l’esprit s’est perpétué, à travers bien des variations, dans les communautés qui portent son nom. Les rapports les plus fraternels règnent aujourd’hui entre ces sociétés et l’église réformée. Ainsi il n’est pas rare de voir des prédicateurs réformés remplacer leurs collègues baptistes ou luthériens que la maladie ou l’absence empêche de remplir leurs fonctions. En 1853, le synode général de l’église réformée ayant résolu la révision de la traduction hollandaise de la Bible, la tâche a été partagée entre un nombre considérable de pasteurs et de théologiens distingués, dont quelques-uns sont mennonites ou remomtrans.

Pour compléter ce rapide tableau des églises de la Hollande, il nous faut encore parler des églises protestantes de langue française ou wallonnes, qui font partie de l’église réformée, mais avec une organisation spéciale. Fondées par l’émigration belge du XVIe siècle, elles reçurent une impulsion nouvelle par l’arrivée des nombreux proscrits de Louis XIV, qui trouvèrent en elles des cadres tout prêts à les recevoir.