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directement sur un régulateur qui termine son âge[1] l’effort de traction accompli par les chevaux, elle porte le nom d’araire ; si la partie antérieure de l’âge repose sur un support armé de roues, la charrue est dite à avant-train ; si plusieurs socs et versoirs sont réunis sur le même appareil, cet appareil prend le nom de charrue polysoc. La force de traction nécessitée par un pareil engin est si grande que nos cultivateurs ne l’ont point adopté. Si la charrue peut, grâce à un système quelconque, verser la terre non plus toujours à droite mais alternativement et à volonté soit à droite, soit à gauche, on lui donne le nom de tourne-oreilles ou brabant double. Il est facile de comprendre que ce genre d’instrument, dont le travail est moins parfait, et dont le poids se trouve fréquemment augmenté, ne convient qu’aux terrains en pente assez rapide pour qu’il importe de toujours verser la terre du même côté pendant l’aller et pendant le retour de l’attelage, et aux champs parcellaires, où il faut économiser le temps perdu dans les tournées ordinaires. Évidemment, agrandir s’il est possible les trop petites pièces de terre et planter en bois les pentes trop rapides serait le plus souvent préférable ; mais il est plusieurs conditions dans lesquelles les charrues tourne-oreilles rendent d’utiles services.

Le sous-sol peut-il être avantageusement mélangé au sol arable pour modifier sa constitution, la charrue doit alors ramener la terre d’une grande profondeur, et par conséquent son versoir doit se prêter à ce profond labour et à ce soulèvement des parties inférieures. On cite dans la plaine de Vaucluse, dans la Manche, dans le Calvados, ailleurs encore, des terrains dont la fertilité et la valeur ont augmenté étrangement par suite du défoncement de la mince couche d’argile qui s’interposait autrefois entre le sol arable et le sous-sol perméable que les charrues dont je parle ont mis aujourd’hui en communication directe. La hauteur du versoir de celles-ci a dû être remarquée par tous les visiteurs de l’exposition.

Le sous-sol, au contraire, est-il de qualité mauvaise, outre que son imperméabilité nuit à la végétation : on dépouille la charrue de son versoir, et on ne fait plus agir que le coutre et le soc, dont on modifie même parfois la forme de diverses manières. Tel est le principe des charrues sous-sol, dites aussi charrues-taupes ou fouilleuses. L’usage de ces instrumens augmente presque toujours dans une forte proportion les récoltes obtenues. Ils exigent un travail supplémentaire ordinairement pénible, ainsi qu’une fumure plus abondante ; mais fumure et travail ne sont, dans ce cas, que de

  1. L’âge est la longue pièce supérieure à laquelle viennent se rattacher presque toutes les pièces de l’instrument ; le soc est le fer destiné à couper horizontalement et sous terre les bandes que le coutre coupe verticalement, et que le versoir soulève pour les renverser.