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dans chaque équipage. On a compris qu’il importait de faire du matelot un homme de mer complet, et on a supprimé certaines dispositions qui lui imposaient dans les ports une sorte de domesticité peu compatible avec la dignité de la vie militaire. On a voulu en même temps rendre l’impôt du recrutement moins lourd pour les familles pauvres, en réduisant de 25 à 14 ans la durée du service exigé. On a supprimé la corporation des enfans de troupes appelés cantonistes, dont la vie entière devait être consacrée à l’état. Les hommes devenus incapables de servir avant l’expiration de leur engagement par suite de blessures ou d’infirmités sont placés dans des établissemens dépendant des bureaux de l’assistance publique et dans une maison spécialement affectée aux invalides, entretenue aux frais du ministère de la marine ; 221 matelots sont logés dans ce dernier établissement avec femmes et enfans, et en outre 333 reçoivent des subsides du ministère. Les victimes de la dernière guerre d’Orient ont été secourues avec la plus libérale générosité. De 1853 à 1856, l’état a distribué en secours aux familles des morts et des blessés de Sébastopol 7, 785, 695 francs.

Une fois le temps du service accompli, l’état s’efforce encore d’assurer l’existence de ses marins. Un projet est à l’étude pour créer des pensions de retraite en dehors des pensions déjà délivrées par le gouvernement et de celles que fournit la caisse de l’émérital, qui fonctionne au ministère de la marine depuis près de quatre ans[1]. Le taux des pensions de retraite délivrées aux officiers de tout grade est cependant déjà considérable. Un amiral, après 25 ans de service, reçoit du trésor 2,860 fr., et de la caisse de l’éméritat 858 fr. ; — après 35 ans, du trésor 5, 720 fr., de la caisse 1, 144 fr. Le chiffre des pensions réunies (du trésor et de la caisse) est de 2,977 fr. pour le vice-amiral après 25 ans, de 5,496 fr. après 35 ans ; de 2,236 fr. pour le contre-amiral dans la première condition, de 4, 128 fr. dans la seconde. Le taux des pensions assurées aux capitaines, lieutenans, enseignes, n’est pas réglé sur une base moins libérale.

Suivons maintenant le marin russe à bord. Ici les améliorations portent principalement sur la vie matérielle. La solde a été augmentée pour l’ordinaire à terre comme en mer. Avant 1853, un maître d’équipage, dans le service à l’intérieur, recevait 71 fr. d’appointemens annuels, plus 58 fr. pour son habillement, 42 fr. pour son logement. La nourriture calculée pour 7 mois seulement comprenait 33 fr. pour alimens divers, 12 fr. pour la viande et le sel. En tout, il recevait une solde de 216 fr. par an. Aujourd’hui, avec 71 fr. d’appointemens, 58 fr. d’habillement, il reçoit 66 fr. pour logement, 33 fr. pour nourriture, 28 fr. pour viande et sel, en tout 256 fr. En mer, il reçoit de plus 160 fr. d’argent de ration. En pays étranger, les appointemens sont portés à 142 fr., l’habillement à 58 fr. ; on lui compte de plus 80 fr. de linge de table et de corps, 544 fr. d’argent de ration. Pour les autres sous-officiers, le total de la solde s’est élevé de 180 fr. avant 1853 à 220 fr. en 1860 pour le service intérieur, de 752 fr. à 848 fr. pour le service extérieur. Les matelots, qui recevaient une solde de 156 fr. en 1853, touchent en 1860 une solde de 196 fr. dans le service intérieur ; — dans le service extérieur, 395 fr. au lieu de 363 fr.

  1. Cette caisse a été fondée en 1856 ; elle possède un capital de 10,400,000 francs.