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une figure sans corrélation nécessaire avec les objets environnans : il s’agissait de retracer sur les voûtes d’un sanctuaire dédié à l’art antique une suite de scènes conformes aux monumens réunis dans ce riche musée, et de représenter encore une fois, après la foule des statuaires grecs, des graveurs en médaille et en pierre fine, après les artistes de tous les siècles et de toutes les écoles, l’Age d’or et l’Age de fer, Vénus et Pandore, Cybèle et les Trois Parques, et autres sujets ou figures expressément symboliques. Ajoutons que, dans la même salle et au-dessous des bas-reliefs sculptés par Simart, quelques-uns des sujets confiés au ciseau du statuaire avaient été. aussi acceptés par M. Ingres, et que d’autres images de l’âge d’or et de l’âge de fer devaient, sous le pinceau du maître, achever de consacrer ces murs. Comment soutenir un pareil voisinage en se fiant à ses propres forces ? Le plus sûr n’était-il pas de décliner personnellement la lutte, ou tout au moins d’abriter sa responsabilité sous l’autorité des anciens modèles, consultés de près et fidèlement reproduits ? C’est le parti que prit Simart, non pas à la dérobée et en cherchant à dissimuler ses emprunts, mais au contraire en proclamant lui-même, comme le faisait Chénier pour un autre ordre de travaux, à quelles sources il avait puisé, quelles leçons il avait suivies.

Qu’on ne s’exagère pas néanmoins la part qui revient dans les bas-reliefs du château de Dampierre aux œuvres et aux exemples d’autrui. Si la Vénus portée par un cheval marin, si Saturne et Janus, ou la figure de Cybèle assise, sont des reproductions presque textuelles de pierres gravées antiques, de même que Thésée terrassant le Minotaure et Triptolème monté sur le char ailé de Cérès procèdent directement de certaines peintures des vases grecs, — les deux scènes qui symbolisent l’âge de fer, et surtout les deux compositions, la Moisson et les Vendanges, où sont résumées les joies sereines de l’âge d’or, portent moins ouvertement ce caractère d’imitation. Bien souvent il n’y a d’imité ici que le style, et l’on pourrait citer plus d’une intention ingénieuse, plus d’un épisode gracieux, pathétique même, où les maîtres de l’art antique n’auraient rien à revendiquer. Elles appartiennent par exemple, très légitimement à Simart, ces figures de deux jeunes époux qui, dans le bas-relief de la Moisson, marchent en échangeant des paroles d’amour au premier rang du rustique cortège, et cette placide image de la jeune mère assise avec son enfant endormi à l’arrière du char où s’entassent les gerbes. N’y a-t-il rien de plus qu’un souvenir des frontons des temples d’Égine et d’Athènes dans ces combattans qui personnifient la Guerre, dans ces deux groupes placés à chaque extrémité de la composition et représentant, l’un un vieillard et une femme qui se cramponnent avec toute l’énergie du désespoir à l’autel d’où