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connaître. Le hobbisme, s’il est faux dans la société politique, ne devient pas rigoureusement vrai dans une ville et dans un village. L’histoire, si remplie de l’éloge des municipalités indépendantes, semble témoigner contre leurs censeurs récens. Sans doute des intérêts légitimes peuvent être méconnus par la sagesse communale. Mettez à sa discrétion l’enseignement primaire : comme le besoin en est d’autant moins senti qu’il est plus grand chez ceux qu’il intéresse, l’école risquera d’être fermée par ceux à qui elle est le plus nécessaire. Que toutes les communes soient maîtresses d’établir un octroi, les plus clairs principes de l’économie politique pourront succomber sous une étroite et capricieuse fiscalité. Enfin la liberté du commerce et la liberté religieuse ne peuvent toujours compter sur l’impartialité judicieuse d’un magistrat municipal. Il faut d’abord conclure de là que sur toutes ces questions le pouvoir local ne peut être son propre législateur. Il faut que la loi générale ait posé des règles dont l’infraction puisse ouvrir un recours en annulation, Pourrait-on se contenter souvent de ces deux garanties, la loi et le pourvoi, sans qu’une formalité de révision et d’autorisation dût être insérée entre deux ? Je le crois, et c’est une des premières concessions à faire en certains cas aux communes. Il ne suffit pas néanmoins de remédier aux abus possibles. Ne peut-il être nécessaire de suppléer à l’inaction et de stimuler la négligence ? Tout le monde tient la législation de 1836 sur les chemins vicinaux pour une des meilleures choses de ces trente dernières années. Elle a obtenu un succès prompt et universel. Or elle statuait sur des intérêts tout matériels dont l’importance ne peut échapper aux plus simples habitans des campagnes, et pourtant elle a dû, pour obtenir de bons effets, non-seulement imposer d’en haut l’uniformité et la maintenir par l’action de l’inspection ministérielle, mais armer l’autorité quasi-gouvernementale du préfet de pouvoirs assez nouveaux à l’égard des communes et même des conseils-généraux. On a encore, depuis vingt-quatre ans, restreint graduellement la part des maires dans la direction des travaux de viabilité vicinale, et peu s’en faut aujourd’hui qu’ils n’en soient exclus. Citer n’est pas approuver ; ce n’est qu’indiquer une circonstance où le zèle et la diligence du pouvoir et du public local n’ont point paru suffire à des opérations qui semblaient tout à fait de leur compétence.

Ces considérations, sur lesquelles insiste M. Dupont-White, n’arrêtent point ses adversaires. Elles ont à peine touché l’écrivain ingénieux qui, dans un recueil déjà cité[1], a résolument proposé de rétablir des administrations collectives dans la commune, dans le

  1. Varia, Nancy 1860.