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chands de bois d’employer des gens très habiles, qui, sachant tirer d’une pièce tout ce qu’elle peut donner, ne gaspillent pas la matière en pure perte. Sur quelques points, en Alsace notamment, où l’on fabrique une grande quantité de sabots à la destination de l’Amérique et de l’Algérie, on a cherché à remplacer le travail de l’homme par celui de la machine, qui fonctionne plus vite et plus régulièrement. Cet usage se généralisera probablement bientôt, et la locomobile finira sans doute par rendre, dans l’exploitation des forêts, des services analogues à ceux qu’elle a rendus à l’agriculture. C’est ainsi que l’homme, affranchi peu à peu de la partie la plus pénible de ses travaux, s’élève graduellement du rang de l’esclave à celui d’un être intelligent qui maîtrise et gouverne à son gré les forces naturelles qu’il parvient à s’assujettir.

Tout ce qui dans une coupe ne peut être utilisé pour la charpente et l’industrie est transformé en bois de feu : ce sont des bois moins précieux, et qui, à volume égal, représentent une valeur moindre que ceux qui sont propres à d’autres usages. Dans les essences résineuses, dont les tiges droites et élancées sont utilisées presque jusqu’au sommet soit pour la fente, soit pour le sciage, les cimes seulement sont converties en chauffage : c’est à peine 20 pour 100 du volume total, tandis que le bois d’œuvre s’élève à 80 pour 100. Dans les futaies feuillues, où les tiges sont moins régulières et les branches plus étalées, la proportion des bois d’œuvre diminue sensiblement, et quand elle s’élève à 60 pour 100, c’est déjà énorme. Dans les taillis enfin, on ne fait guère que des bois de feu, et c’est à peine si les réserves, qui tombent dans les exploitations, peuvent donner un cinquième du volume total susceptible d’être employé comme bois de service ou d’industrie.

Le bois de feu comprend le bois de chauffage, le bols à charbon et les bourrées. Le bois de chauffage, celui qui flambe dans nos cheminées, est livré à la consommation un an environ après la coupe, débité en bûches dont la longueur varie, suivant les localités, de 1 mètre à 1m 33. Ce délai est nécessaire pour qu’il perde l’humidité intérieure qu’il renferme et qu’il puisse brûler facilement et sans charbonner. Les essences qui donnent le meilleur chauffage sont le charme, le hêtre et le chêne. Les bois résineux éclatent au feu, et, comme les bois blancs, ils brûlent très vite en donnant une flamme claire : aussi ne sont-ils guère employés dans les usages domestiques; ils sont recherchés au contraire par les boulangers et les chaufourniers, parce qu’ils portent rapidement les fours à une haute température. A défaut de ces bois, ils emploient des bourrées qui sont formées des parties les plus ténues des branches, réunies entre elles par un lien.