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l’instruction contre les délinquans, et peuvent faire arrêter un prévenu par les gendarmes, les gardes de finances et les gardes champêtres. Le convocato nomme les agens de la commune, le maître d’école, le médecin, la sage-femme, et fait exécuter tous les travaux d’utilité publique. Dans les communes qui ont plus de trois cents propriétaires, cette administration démocratique cessant d’être praticable, on nomme un conseil de trente membres; mais les deux tiers au moins des conseillers doivent être propriétaires, un tiers seulement peut être choisi parmi les industriels et les commerçans. Dans 522 communes existent les conseils élus; dans 1,587 fonctionne le convocato, cette assemblée rudimentaire où le plus petit propriétaire a le même pouvoir légal que le plus grand.

Jusqu’en 1848 existait, pour compléter ce système, une magistrature singulière et tout italienne d’origine. Les non-propriétaires élisaient un délégué qui défendait leurs intérêts dans le conseil et avait droit de veto, sauf recours à l’autorité politique.

Telle était dans son originalité nationale la commune lombarde. L’empereur François-Joseph ajouta en 1855 à cet organisme celui des congrégations provinciales, qui centralisaient le travail des communes: mais cette institution était marquée du cachet de l’étranger, empreinte d’idées allemandes : à chaque pas, des conditions de cens, partout l’ingérence de l’autorité centrale, puis, quand il s’agit de nommer les comités directeurs de ces congrégations, une distinction toute germanique et monstrueuse pour des Lombards entre les propriétaires nobles et les propriétaires non nobles. Toutefois ces importations étrangères ne gênèrent que faiblement le jeu des antiques rouages de la commune, tant il y avait de force dans leur simplicité! Le convocato est resté l’expression la plus saisissante de la vie municipale des Lombards.

Aussi ce fut un cri douloureux dans toute la province quand, au mois d’octobre 1859, le ministre Rattazzi vint toucher à cette arche sainte, et au nom de l’unité administrative apporter une nouvelle loi communale. Il le faisait en hésitant. « Votre ministre, dit-il au roi dans l’exposé des motifs de la loi, voulant laisser aux nouvelles provinces tous les élémens de leur prospérité, inclinait à y conserver les formes communales, fruit de la sagesse nationale, que la domination étrangère n’avait pas détruites. Il pensait même à ne pas faire du maintien de ces formes communales une exception, mais à introduire dans tout le royaume cette institution des convocati où le peuple concourt par voie directe au gouvernement de la commune, et qui, dans d’autres temps et dans d’autres conditions, a donné chez nous, comme chez les autres peuples, de si heureux résultats. Il n’a renoncé à cette idée qu’après avoir entendu l’avis de personnes dis-