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ou tout au moins du carbone. Si M. Pouchet a vu des animalcules dans l’eau de rosée, qui passe pour très pure, je pense que cela tient précisément à ce que dans celle-ci la poussière de l’air qu’elle a traversé est en suspension, et cette eau rentre ainsi dans la catégorie des infusions normales. Je fais la même observation sur les cas où des végétations ont apparu dans les dissolutions qui semblaient purement minérales. Ainsi Retzius a vu une plante naître dans une solution de chlorure de baryum, Gruithuisen des infusoires dans une macération de granit ou de craie ; d’autres sont nés, dit-on, sur du corail humecté d’eau distillée, et un courant électrique a fait paraître un champignon dans des solutions de silicate de potasse ou de nitrate de cuivre. Il est difficile de croire que ces substances fussent tout à fait exemptes de matière organique, car il y aurait eu dans ces expériences non-seulement génération spontanée, non-seulement transformation d’une substance minérale en tissus organiques, mais encore, dans quelques cas, création de matière, puisque les élémens des produits ne se trouvaient pas tout entiers dans les élémens employés.

Les microzoaires naissent surtout à la surface de la dissolution, ce qui prouve que l’air est indispensable à leur vie, et ce qui donne à penser qu’il apporte peut-être leurs ovules. Au-dessous de 5 degrés centigrades, aucun n’apparaît, et leur nature varie avec la température. La même infusion qui à 26 degrés produit le vibrio levis et le V. granifer ne donne à 12 degrés qu’une espèce de bacterium, le B. triloculare. Il est remarquable que les excès de température en chaud ou en froid, qui ne les tuent pas vivans, s’opposent à leur production ou à leur éclosion. Quant à la lumière, elle a aussi quelque influence. Burdach avait pensé que le soleil leur était nécessaire ; mais M. Pouchet a vu qu’une lumière peu intense leur est favorable, et qu’ils naissent même dans l’obscurité. Le rayon rouge a la meilleure influence, puis le violet, le bleu, et enfin le vert. Il est remarquable que l’ordre est inverse, lorsqu’il s’agit des végétaux qui semblent se développer spontanément. Un courant électrique accroît les grosseurs et accélère les naissances. Il est possible enfin qu’ils s’accroissent, changent ou diminuent avec les heures de la journée, de même qu’on a vu quelques insectes naître régulièrement à midi ou à dix heures du matin.

Il est difficile de ne pas trouver déjà dans ces expériences des preuves assez frappantes. Cette variété merveilleuse d’êtres suppose une variété et une abondance de germes miraculeuse. Et puis quels germes singuliers qui peuvent ou non se développer dans des circonstances qui semblent bien semblables ! On conçoit au contraire qu’une différence très faible de composition amène une différence