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glas ne pouvait être désigné par la convention démocratique quand elle se réunirait de nouveau, il était également en son pouvoir d’empêcher tout autre de l’être, puisqu’il disposait de la moitié des voix. Tout donnait donc à penser que la convention de Baltimore n’aboutirait pas plus que celle de Charleston. Le Mercury s’en félicitait d’avance. Mieux valait pour le sud avoir affaire à un ennemi franc et déclaré qu’à un adversaire déguisé sous les dehors de l’amitié. Une désignation unanime ne pouvait avoir lieu que si les deux fractions du parti se prêtaient à des équivoques et à des mensonges; il était indigne du sud de tremper « dans cette ignoble comédie; » il lui fallait réclamer tous ses droits et rompre avec quiconque ne les reconnaîtrait pas ouvertement. « Bien des gens, disait la Chronique d’Augusta en Géorgie, regardent la dissolution du parti démocratique comme le glas de la république, comme le sûr avant-coureur de la rupture de l’Union. Nous espérons qu’il n’en sera rien, et nous croyons sincèrement qu’il était indispensable de briser le parti. Depuis plusieurs années, comme chacun le sait bien, il n’y avait plus que le nom du parti sur lequel ses membres fussent d’accord, et ce nom servait à couvrir mille iniquités... Les droits du sud sont incompatibles avec la souveraineté des pionniers, que prêche la démocratie du nord : le sud ne peut les abandonner. » Le Mississipien de Jackson applaudissait également à la conduite des délégués du sud à Charleston comme à une « inévitable nécessité politique : se soumettre à la loi de la majorité sectionnelle de la convention eût été la mort pour la démocratie du sud. »

La lutte se continuait ainsi dans la presse avec la même aigreur et le même acharnement qu’au sein de la convention. Elle ne tarda pas à être transportée au sénat. M. Jefferson Davis, en demandant la mise à l’ordre du jour de ses résolutions, prononça contre M. Douglas un discours amer et plein de personnalités. M. Clingman, de la Caroline du nord, ayant pris la défense de M. Douglas et insisté sur la nécessité pour le parti démocratique de ne pas se diviser, s’il voulait conserver une chance de succès, M. Benjamin, de la Louisiane, protesta avec vivacité contre la pensée de sacrifier les principes du parti à la satisfaction d’un triomphe électoral et surtout à l’ambition d’un homme. «Qu’on me donne, dit-il, un programme qui assure nos droits, qui soit pleinement satisfaisant pour mes concitoyens, et, comme personnification de ce programme, prenez tel homme qu’il vous plaira, qui puisse honorablement l’adopter : cet homme sera mon candidat. Je parcourrai mon état dans son intérêt, je lui consacrerai mes forces et mon temps, je serai prêt à parler pour lui partout, autant de fois, à quelque heure que ses amis le demanderont. Rien ne m’arrêtera; mais je ne me sens pas le cœur de com-