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son capital à 1,000 francs par hectare. On trouve de grandes exploitations dans la zone argileuse, précisément parce que le sol, naturellement fertile, y exige moins d’efforts et moins d’avances de toute nature. À la vérité il paraît que, dans certaines provinces françaises, notamment en Alsace et en Lorraine, on se plaint de l’excès de la division du sol, qui empêche un assolement rationnel de s’établir, et qui arrête l’extension des cultures fourragères. Dans les Flandres, cultivateurs et propriétaires se félicitent du morcellement, les premiers parce qu’il met plus de terres à leur disposition, les seconds parce qu’il double leurs fermages. La parcelle n’eût-elle que quelques ares, celui qui la fait valoir apprécie trop l’importance des lois de l’assolement pour lui faire porter deux ans de suite des récoltes épuisantes. La subdivision des exploitations, loin de diminuer la culture des plantes destinées au bétail, semble l’augmenter, car l’arrondissement de Termonde, où les exploitations sont le plus réduites, est aussi celui qui nourrit le plus de bêtes bovines : 118 par 100 hectares de terre labourable.

Le morcellement qui n’est pas amené par les nécessités économiques et par l’intensité de la demande, mais qui est la conséquence d’un partage de succession, peut présenter des inconvéniens réels et nuire aux conditions productives du sol. Heureusement le fait ne se présente que rarement, et pour ainsi dire jamais, dans les cantons où la culture est conduite avec le plus d’intelligence, dans le pays de Waes par exemple. Quand une ferme ou une pièce de terre ne peut se partager sans que la valeur en soit diminuée ou l’exploitation rendue plus difficile, les héritiers sont presque toujours trop pénétrés de leur véritable intérêt pour réclamer le partage. Plutôt que de déprécier la propriété, ils la vendront, la céderont à l’un d’entre eux ou laisseront subsister l’indivision. Partout où l’agriculture est soignée, chaque champ a une certaine foi-me en rapport nécessaire avec la configuration du terrain et la disposition des lieux, forme qui lui communique une sorte de beauté et de perfection dont le paysan a l’intelligence et qu’il ne veut pas détruire. Si ceux qui cultivent la terre comprennent ce qu’elle exige pour donner des produits abondans, le morcellement, loin de diminuer sa fécondité, l’augmentera presque toujours notablement. S’ils ne le comprennent pas, les grandes fermes ne seront guère mieux exploitées que les petites, souvent même elles le seront moins bien. Ce n’est pas à dire que la subdivision des exploitations soit un idéal à pro()oser aux sociétés modernes, car elle exige de l’homme un redoublement de travail et d’efforts peu compatible avec le développement de ses facultés intellectuelles ; mais au sein de l’organisation actuelle, et en Flandre, on peut affirmer qu’elle n’a eu jusqu’à ce jour que des résultats avantageux pour la production et pour la rente.