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les machines, donne tant de prix au travail de l’homme. Nous assistons à une véritable révolution économique, qui marque d’un signe particulier l’histoire du XIXe siècle, et dont notre génération a pu observer les phases, déjà si rapides et si merveilleuses, aux expositions de 1851 et 1855. Comment dénombrer, compter, classer ces quantités infinies de produits de toute nature que l’industrie fabriqué aujourd’hui avec une incroyable activité ? Comment leur appliquer les procédés de la statistique et les soumettre à la rigoureuse loi des chiffres ? La tâche est plus que difficile, et cependant on l’a bravement tentée : la statistique industrielle n’a rien à envier à la statistique agricole ; elle a été l’objet de nombreuses études dont il serait injuste de ne pas reconnaître le mérite. Nous citerons en première ligne la statistique des mines et celle des chemins de fer, qui contiennent des informations très détaillées et généralement exactes sur la situation de deux industries dont les destinées intéressent par tant de points la prospérité publique. On trouve encore de précieux renseignemens dans les enquêtes qui, à diverses époques, ont été ouvertes par le gouvernement sur plusieurs branches d’industrie, ainsi que dans les rapports publiés à la suite des expositions. Il faut également tenir grand compte des statistiques entreprises sous la direction des municipalités et des chambres de commerce, et ne pas oublier les travaux consciencieux, mais trop ignorés, auxquels se livrent quelques bénédictins de province en l’honneur de leur ville natale. Toutefois ces recherches, s’appliquant à une branche particulière d’industrie ou ne comprenant que d’étroits espaces, sont tout à fait insuffisantes pour donner une idée, même approximative, du chiffre qui représente sur toute la surface du territoire l’ensemble du mouvement industriel. L’administration, avec les ressources dont elle dispose, réussira un jour à compléter, en l’améliorant, ce grand travail qu’elle a essayé à plusieurs reprises, sans trop de succès jusqu’ici. Les chiffres de la statistique officielle de l’industrie, publiée en 1852 par le ministère du commerce, ont été souvent, et avec raison, contestés, sans que ces critiques, parfois trop vives, doivent décourager de nouveaux efforts. La tâche est si malaisée que les statisticiens officiels doivent prévoir bien des contradictions lorsqu’ils endossent la responsabilité des renseignemens qui leur arrivent, imparfaitement contrôlés, de tous les points de la France.

Dans le chapitre qu’il a consacré à la statistique de l’industrie, M. Block cite un grand nombre de chiffres extraits des documens administratifs ou empruntés aux écrits individuels qui méritent quelque confiance ; mais il ne se pas fait illusion sur l’exactitude des évaluations qu’il place sous nos yeux, et il exprime plus d’une fois des doutes et des critiques qui nous tiennent utilement en garde contre les erreurs. Après beaucoup de recherches, il est arrivé à