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de coloration identiques, tandis que le rôle des parens était inverse. Dans l’un, le père était nègre, la mère blanche ; dans l’autre, le père appartenait à la race blanche, et la mère, qui se donnait pour mulâtresse, avait tous les caractères d’une négresse pur sang. Dans les deux familles, il y eut trois enfans ; dans toutes deux, le sang noir prédomina d’abord d’une manière très marquée, perdit ensuite de son influence, et sembla s’effacer presque complètement dans les derniers nés[1].

Dans les exemples précédens, la couleur claire ou foncée était d’ailleurs uniforme ; mais il arrive aussi que les deux teintes peuvent se juxtaposer, et de là résultent des individus pies. Les faits de cette nature cités par les auteurs sont assez nombreux, et Buffon s’en était déjà préoccupé. White signale deux individus dont le corps était en quelque sorte mi-parti) mais dans l’un la moitié inférieure du corps était noire, et la moitié supérieure blanche ; dans l’autre, les couleurs étaient disposées à droite et à gauche. Tous deux sortaient d’unions croisées. J’emprunterai encore au docteur Parsons, cité par Prichard, un fait intéressant par les détails naïfs qui semblent en attester l’authenticité autant que le nom de celui qui les raconte. « Un nègre domestique se maria avec une femme blanche qui servait dans la même maison. Vers la fin de la première grossesse, le maître emmena le serviteur, qui fut absent pendant quelques jours. Dans l’intervalle, la femme accoucha d’une jolie petite fille, semblable à celle de deux parens blancs, présentant tous les traits de sa mère. À son retour, le mari fut profondément troublé en apercevant cette enfant, et se prit à jurer qu’elle n’était pas de lui ; mais la nourrice calma bientôt sa colère : elle déshabilla la petite fille et fit voir au père que, du côté droit, le bas du dos et le haut du membre inférieur étaient aussi noirs que lui-même. Le mari se réconcilia sur-le-champ avec sa femme et son enfant. Je fus informé du fait, ajoute Parsons, et, m’étant rendu sur les lieux, je trouvai que tous ces détails étaient vrais. »

On le voit, en admettant que la ressemblance unilatérale et la juxtaposition des caractères ne se rencontrent que chez les métis, le produit du croisement entre groupes humains satisfait pleinement à cette condition. Dans cet ordre d’idées, les faits que nous venons

  1. Il me paraît utile de résumer sons forme de tableau les renseignemens donnés par M. Prosper Lucas, qui avait eu sous les yeux pendant un an la seconde de ces familles :
    Père noir, mère blanche Père blanc, mère noire
    1° Négrillon pur sang par la couleur 1° Mulâtre tirant sur le nègre
    2° Vrai mulâtre 2° Mulâtre brun plutôt que noir
    3° Fils blanc d’une figure agréable, à cheveux blond rouge très frisés 3° Fille blanche d’une figure agréable et pétillante d’esprit