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la diète de Francfort, c’est donc, dans le cas présent, se livrer soi-même-les mains liées au gré de l’Allemagne, préparer une absorption nouvelle du Danemark et rendre inévitables l’anarchie et la dissolution d’un état indépendant.

Voilà la difficulté, voilà le péril qui empêche le Danemark de céder à la volonté récemment exprimée par la diète de Francfort. On doit bien croire qu’un état de deux millions d’âmes ne s’expose pas étourdiment et sans motif sérieux à une guerre contre une nation de quarante millions d’âmes ; il faut qu’il soit contraint à cette lutte inégale, et quelle plus forte raison pourrait le contraindre que celle d’éviter le sort de la Pologne ?

Il est vrai, comme nous l’avons remarqué, que la confédération germanique ne prétend pas faire admettre ce veto absolu des états holsteinois dans une organisation définitive, elle ne l’exige qu’à titre de mesure provisoire ; mais attendez, voici une autre prétention, celle-ci permanente et qui aspire à s’imposer à la constitution future : la confédération germanique veut une représentation égale des diverses parties de l’état dans l’assemblée commune ou rigs-raad. — Est-ce que la constitution du 2 octobre 1855 n’a pas donné la réponse ? N’assigne-t-elle pas au duché de Holstein, comme au duché de Lauenbourg, une représentation proportionnelle à sa population ? Ou bien prétend-on que 544,419 Holsteinois aient dans l’assemblée commune autant de représentans que deux millions et plus de Danois et Slesvicois ? Ce serait une manière nouvelle de comprendre l’égalité. La réponse sur ce point n’a jamais été, malgré les instances de l’envoyé danois à la diète de Francfort, très précise. Si les déclarations officielles sont obscures, la prétention en soi n’est pas douteuse : oui, c’est bien là ce qu’on veut. Quelles en seraient les conséquences ? Exactement les mêmes que celles d’un veto accordé aux états holsteinois. L’élément holsteinois, c’est-à-dire purement allemand, entraînerait facilement vers lui dans le conseil commun la représentation slesvicoise, et tiendrait en échec l’élément purement danois ; il frapperait d’impuissance toute législation commune. C’est absolument, comme on voit, le même résultat que celui qui nous apparaissait tout à l’heure.

Ce n’est pas assez que l’Allemagne ait, grâce à la constitution commune, la porte du Holstein toujours légalement ouverte pour s’ingérer dans les affaires intérieures de la monarchie danoise ; il faut encore qu’au mépris de tous les droits historiques, au mépris d’une autorité par elle-même cent fois reconnue, elle poursuive l’administration et le gouvernement du roi de Danemark jusque dans le Slesvig, par cette bonne raison qu’il y a dans une partie du Slesvig des gens qui parlent le plat-allemand ! Écoutez les maximes