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peuvent en définitive être très inférieurs à ceux qu’il aurait introduits ? La troisième règle à suivre est d’abandonner au fermier son entière liberté d’action, sauf à prendre quelques mesures de prudence. Ces mesures, les voici : le fermier devra assurer contre l’incendie son matériel d’exploitation, ses bestiaux et ses récoltes ; il ne pourra ni arracher les bois ou haies reconnus utiles, ni anticiper sur les époques de coupe qui sont admises par le bail ; il ne pourra jamais vendre de fumiers, ni défricher les prairies naturelles qui existent ; il devra entretenir sur le domaine un effectif d’animaux dont le minimum est à déterminer d’après l’importance et les conditions culturales de la ferme, comme aussi soigner les arbres à fruits qui existent sur sa terre, et en effectuer le remplacement d’accord avec le propriétaire, à qui seul reviendront les arbres morts. Enfin il ne pourra, pendant les quatre dernières années du bail, vendre ni pailles, ni fourrages, ni cultiver en plantes industrielles plus d’un nombre d’hectares fixé d’avance. Il devra également laisser à son successeur un minimum convenu de pailles, de fourrages, de terre en jachère et de prairies artificielles d’âges différens, et lui permettre en outre d’ensemencer en herbes fourragères qui ne seront point pâturées une certaine partie de ses dernières céréales.

Est-il besoin d’expliquer longuement l’esprit de ces clauses ? Elles ont pour but d’empêcher le fermier d’appauvrir sa terre ; elles lui laissent toutes les latitudes désirables, même celle de vendre pendant quelque temps des pailles et des fourrages, si le voisinage d’une ville, en lui permettant d’acheter en échange des fumiers et des engrais, lui rend avantageuse une telle opération ; elles assurent la transition de la ferme en bon état de fourrages et de fumure entre les mains du successeur, et elles conservent toujours la valeur du gage mobilier, qui répond au propriétaire de ses fermages. Or, ces résultats obtenus, pourquoi entrer dans d’autres détails et gêner le cultivateur en lui imposant certains assolemens et certaines méthodes ? Les clauses qui précèdent et l’article 1766 du code civil font au propriétaire une position suffisamment rassurante, et, en cas d’abus, lui facilitent parfaitement la résiliation dès qu’il se croira en droit de la demander.

Quant au fermier, auquel il est juste de penser aussi, nous lui conseillons, s’il veut entrer dans une voie d’améliorations sérieuses, la clause que Matthieu de Dombasle avait insérée dans son bail de Roville, en l’empruntant à lord Kames. Cette clause stipule pour le fermier le droit de prolonger la durée de sa jouissance, s’il offre au propriétaire une augmentation quelconque sur le fermage primitivement consenti, et elle impose au propriétaire, en cas de refus, une indemnité proportionnelle (non pas égale) à l’augmentation