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pour ainsi dire chargés de la voirie, la peste ne tarderait pas à y éclater. L’islamisme en effet n’est qu’un judaïsme déguisé, il ne voit dans la vie future qu’une continuation de l’existence terrestre embellie par une extrême sensualité. La religion grecque, dite orthodoxe, quoiqu’un peu plus propre que le mahométisme, ne marque sur lui qu’un progrès presque insignifiant. Plus le catholicisme est absolu, c’est-à-dire ultramontain, plus ses partisans oublient les lois de la propreté : l’Italie et l’Espagne le prouvent ; la France a moins d’incurie, parce qu’elle est gallicane., et aussi, il faut le dire, parce qu’elle subit depuis quelques années l’influence de la protestante Angleterre. Dès que nous entrons dans le protestantisme, la propreté nous apparaît avec toutes ses recherches ; dans certaines sectes méthodistes, elle devient une sorte de manie, ainsi qu’on peut le remarquer dans plusieurs villes hollandaises et notamment dans le village de Broeck. Quelle tache immonde le quartier juif ne fait-il pas au milieu d’Amsterdam ! Et en Suisse quelle différence subite et saisissante entre les cantons catholiques et les cantons protestans ! On pourrait, sans craindre de se tromper, formuler cet axiome : plus les hommes par leur religion se rapprochent du judaïsme, plus ils sont sales ; plus ils s’en éloignent, plus ils sont propres. Le paganisme, au moins autant que l’hébraïsme, devait avoir à ce sujet des négligences absolues ; il a fleuri de toutes ses forces dans l’Italie méridionale, dans la Grande-Grèce, où tous les cultes ont passé tour à tour, et qui fut une sorte d’Olympe successif. Ses traces n’y sont encore que trop vivantes ; les Calabres et Naples elle-même ne sont-elles pas des réceptacles d’immondices ? L’idée très naturelle d’approprier les villes n’est venue à aucune des administrations qui ont gouverné le pays, et Maïda sous ce rapport est un échantillon curieux : c’est l’idéal même de la saleté.

Elle est belle cependant, cette ville juchée sur sa montagne isolée, entourée de verdures qui s’élancent vers elle et lui font un touffu piédestal, commandant la plaine qu’elle surveille du haut de sa crête, ainsi qu’une vedette toujours en alerte, et ne laissant à nulle autre le droit de marcher avant elle au combat. La plaine qui s’étend à ses pieds, et que coupent les méandres du fleuve Lamato, semble être formée des plateaux réunis d’un grand nombre de basses collines ; elle est fermée vers l’ouest par le golfe Sainte-Euphémie, que je vois briller à l’horizon, au nord par la chaîne des Apennins, qui se dresse, comme une infranchissable muraille, dans une anfractuosité où la petite ville de Nicastro s’étale en amphithéâtre. Vers la fin du jour, à l’heure malsaine où la brume s’amasse lentement au-dessus des marais, de grandes bandes de nuages ternes s’allongent sur les montagnes et les traversent comme un fleuve de couleur