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leurs privilèges violés eussent été hautement revendiqués, » elles remettaient à six jours de là leur prochaine réunion, et ordonnaient qu’un certain nombre de leurs membres siégeraient en comité particulier à Guild-Hall. Le vote, régulièrement pris, donna cent soixante-dix voix pour ces conclusions et quatre-vingt-six contre ; mais bien que la majorité fût assez forte, vous le voyez, pour exclure les royalistes du comité dont elle obtenait la formation, plusieurs d’entre eux, et des plus notables, en firent partie, notamment les deux nouveaux secrétaires d’état, Falkland et Colepeper. Je noterai seulement que ni M. Hyde comme partisan du roi, ni M. Oliver Cromwell à titre d’ennemi de la cour, ne firent partie du select committee. Il fut réglé d’ailleurs que tous les membres des communes qui voudraient officieusement assister aux délibérations de Guild-Hall seraient admis à y voter les mesures qu’on y proposerait, soit pour le maintien du privilège parlementaire, soit pour la sûreté du royaume. Avis de tout fut donné à la chambre des lords par un message spécial ; mais, avant que le messager fût de retour, une brusque panique avait dispersé l’assemblée. Il s’était répandu aux portes du palais, on ne sait comment, qu’un corps armé s’acheminait de ce côté, et des cris interrompirent un des membres qui proposait certaines résolutions relatives à l’Irlande. Celui-ci pourtant ne se troubla point, et voulut qu’on votât sa motion, ce qui à la vérité fut fait, mais sans observer toutes les formes, après quoi, un peu en désordre et s’ajournant au mardi 11, la chambre se sépara sur les quatre heures. J’ose penser que si sa majesté eût reçu à Guild-Hall et sur sa route plus d’encouragemens qu’elle n’en obtint, la fausse alarme qui mit fin aux débats de ce jour eût bien pu se transformer en quelque chose de beaucoup plus sérieux.

La mesure qui transportait dans la Cité, au milieu de citoyens armés et prêts à la défendre, les délibérations de la chambre des communes était, à mon avis, un coup de politique fort habile, car la suspension absolue des séances eût été le signal d’un complet désarroi, tandis qu’en se plaçant ainsi chaque jour sous la protection immédiate des bourgeois de Londres, les députés forçaient ceux-ci à faire cause commune avec le reste du pays. De plus, sous cette forme détournée, ils s’associaient aux cinq membres accusés (toujours réfugiés dans Coleman-street), ils se tenaient en communication continuelle avec eux, et les abritaient contre les effets, encore fort à craindre, des poursuites exercées contre eux par le roi. La Cité, reconnaissante de la confiance du parlement, avait pris les armes. Ses portes et poternes, fermées chaque soir, étaient gardées avec soin ; de plus on signait de tous côtés une humble pétition à sa majesté « afin que les membres accusés fussent poursuivis conformément aux règles parlementaires, » et force pamphlets s’imprimaient