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payer soit réglé pour l’un et l’autre combustible sur la puissance calorifique. À poids égal, la houille, qui donne plus de chaleur que le bois, devrait par conséquent être plus imposée, tandis qu’elle l’est beaucoup moins. La consommation du bois de chauffage à Paris a du reste considérablement diminué ; après s’être élevée à 1,200,000 stères en 1815, elle est tombée en 1859 à 501,805 stères. Celle de la houille a suivi une progression inverse, mais bien autrement puissante ; elle a passé de 600,000 quintaux métriques à 432 millions. Paris consomme aussi une très grande quantité de charbon de bois, qui lui est expédié des ports de la Loire, de l’Allier, de la Marne, de la Seine et des canaux d’Orléans et de Briare. Il en a été introduit en 1859 3,220,000 hectolitres, non compris le charbon de Paris, qui n’est autre que du poussier de charbon comprimé et aggloméré avec du goudron. Le commerce des charbons est libre comme celui des bois ; mais les magasins sont rangés parmi les établissemens insalubres ou dangereux et soumis aux règlemens qui les concernent.

Si Paris est un grand centre de consommation pour les bois de charpente et d’industrie, c’est dans nos départemens producteurs de fer qu’il faut étudier l’emploi des bois de feu sous une de ses formes les plus intéressantes. La quantité de bois annuellement consacrée à la fabrication du fer et de la fonte, et consommée à l’état de charbon dans les hauts-fourneaux, est très considérable. D’après une statistique officielle publiée en 1854 par le ministère du commerce et des travaux publics, elle s’est élevée en 1852 à 5,167,772 quintaux métriques de charbon, valant 30,682,624 francs ; elle représente, en y ajoutant le bois brûlé en nature, environ 8 millions de stères, c’est-à-dire la production annuelle de 2 millions d’hectares de forêts, le quart de la superficie boisée de la France. Les forges sont donc pour les produits des forêts un débouché très important, toujours certain, qui contribue à maintenir le prix du bois à un chiffre rémunérateur pour les propriétaires. Aussi n’est-il pas étonnant que ceux-ci, considérant leur cause comme solidaire de celle des maîtres de forges, s’inquiètent vivement de tout ce qui peut porter atteinte à la prospérité de l’industrie métallurgique. C’est à ce titre qu’on les a toujours vus, marchant à la remorque de ces derniers, se montrer d’ardens protectionistes et protester avec vigueur contre tout remaniement libéral du tarif des fers. Ils furent pour les maîtres de forges de puissans auxiliaires qui leur permirent de défendre, au nom de l’intérêt général, le monopole dont ils jouissaient. — La loi, disaient-ils, nous interdit le défrichement de nos bois ; en nous empêchant de les transformer en terres arables et d’en tirer le parti le plus convenable, elle nous impose, dans l’intérêt de tous, un sacrifice personnel :