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oscillations de la seule réserve officielle de numéraire qu’elle possède. L’émission d’une plus grande quantité de billets de banque rendrait disponible une partie du numéraire qui sert maintenant presque exclusivement aux échanges. Ces dépôts d’or ou d’argent ne pourraient pas être atteints par la solidarité qui existe entre les grands établissemens qui siègent dans les capitales, car les besoins auxquels les banques départementales auraient à pourvoir seraient limités et concentrés dans la région même où elles seraient établies. Bien loin de nuire à la Banque centrale, elles pourraient au contraire remplir auprès d’elle un office analogue à celui que les receveurs-généraux remplissent auprès du trésor. Dans cet ordre d’idées, elles devraient être indépendantes les unes des autres, mais toutes concourir, dans les momens de crise, au maintien de l’équilibre dans le loyer des capitaux et la circulation des valeurs fiduciaires, dont il est indispensable dans ces occurrences de faire des ressources sans en avilir le prix par des ventes forcées.

Que l’on veuille bien réfléchir à ce que serait notre situation financière, si les banques départementales existaient encore, avaient augmenté leur capital dans la proportion du double ou du triple, et si l’on avait donné à toutes les villes qui l’ont réclamé inutilement le privilège d’en établir, de telle façon qu’il y eût maintenant en France trente ou quarante banques ! — Nous aurions une réserve métallique du double, et presque toutes les grandes villes auraient vu éclore dans leur sein des sociétés qui auraient augmenté la production du pays, et qui n’ont pu se former parce que la centralisation du crédit a en même temps réuni toutes les affaires dans les mains des financiers et de la Bourse de Paris. En proposant de rétablir et d’étendre les banques départementales, nous voulons donc surtout pousser à réclamer, pour sortir du régime périlleux où nous sommes, une décentralisation du crédit, parce que nous sommes profondément convaincu que cette décentralisation est le seul moyen efficace à employer pour rétablir l’ordre et la régularité dans nos affaires financières.

En matière économique comme dans l’ordre physique, ce n’est qu’avec plusieurs points d’appui qu’on obtient un équilibre de quelque durée. La Banque de France est aujourd’hui dans une telle situation que son isolement, au lieu de la consolider, l’ébranlé, et qu’étant sans cesse préoccupée de veiller au bien-être de son existence, les précautions qu’elle est constamment sur le point de prendre pour se protéger elle-même sont devenues des causes permanentes d’appréhensions. C’est dans la multiplicité, nous ne disons pas la liberté des banques, que se trouvent-les élémens d’une sérieuse réforme financière. « Tout se fait et doit se faire par une sorte