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Un mot encore sur cette question monétaire. Le métal étant devenu indispensable dans un état de choses où la dispensation du crédit est bornée et centralisée, le commerce et l’industrie ont dû prendre l’habitude d’avoir presque constamment recours à l’argent et à l’or pour leurs transactions. Cependant les billets de banque, en se multipliant, procureraient une économie notable dans l’emploi du numéraire et abaisseraient le taux normal de son loyer, outre la facilité admirable qu’ils donneraient pour le maniement des fonds et les transports. Les perplexités continuelles auxquelles nous sommes livrés par l’autocratie du capital monnayé commandent donc qu’on établisse à côté de lui une puissance qui lui fasse contre-poids.

En résumé, pour prévenir et combattre les crises financières, pour éviter les dangers du présent et assurer le travail de l’avenir, il faut une organisation de crédit puissante, répandue sur toute la surface de la France, et qui soit en même temps l’organisation de ses diverses forces. Il faut que l’individu puisse développer toutes les facultés qu’il possède pour créer et accroître la richesse nationale. C’est dans cette émancipation virile de l’individu que nous rencontrerons de nouveaux élémens de fécondité. On dit que la supériorité de l’armée française sur toutes les autres armées réside dans la confiance que chaque soldat possède en lui-même, dans l’initiative que cette confiance lui inspire, dans la certitude qu’il a de la supériorité de ses armes et de son éducation militaire, dans la sécurité où il est que lui et tous ses camarades sont abondamment pourvus de ressources de toute nature et remplis de la même confiance. Ainsi, sûr de lui-même et des autres, sachant que tout est organisé pour venir en aide à son courage, le soldat ne comprend pas la défaite et ne croit qu’à la victoire. Eh bien ! dans la mêlée de la vie active, dans les affaires, dans les luttes tant intérieures qu’extérieures, il est utile que le soldat du commerce et de l’industrie, que le serviteur des œuvres nouvelles soit animé du même esprit, qu’il soit pourvu d’armes à sa taille et à sa main, qui lui donnent la foi dans sa force en même temps que la sécurité dans l’exercice de ses facultés. C’est en s’appliquant à réaliser ce progrès qu’on pourra établir dans notre régime financier et industriel un ordre désormais absolument indispensable au développement de toutes les ressources qui doivent maintenir et accroître la fortune de la France.


G. POUJARD’HIEU.