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de fer du nord de la Péninsule, qui par sa nature est le mieux fait pour exciter l’intérêt de la France, est aussi peut-être celui qui a le plus souffert de ces embarras dont s’est trouvée assaillie à un certain moment l’industrie des voies ferrées en Espagne. Dès 1853, M. J. Salamanca était concessionnaire d’une ligne qui, partant de Madrid, devait aller aboutir à Irun. Cette concession longtemps douteuse, après avoir eu à lutter contre des difficultés de toute nature, resta sans résultat ; elle fut annulée. La révolution qui survint en 1854 non-seulement retarda l’exécution de cette ligne, mais encore, par la solution qu’elle lui donna, fit naître tous les incidens de la traversée des Pyrénées.

Lorsqu’on 1856 la société du Crédit mobilier espagnol fit ses premières propositions pour la construction de la grande artère du nord, à peine osait-on regarder en face l’idée de pousser la ligne jusqu’à la frontière française ; il semblait impossible d’embrasser d’un seul coup d’œil un ensemble de 700 kilomètres. On procéda par concessions successives, décrétant un jour le tronçon de Valladolid à Burgos, qui était le plus facile, un autre jour celui de Burgos à Santander par San-Isidro et Alar del Rey, un peu plus tard enfin les deux sections extrêmes de Madrid à Valladolid et de Burgos à Irun[1]. Le réseau se trouvait ainsi complet, au moins dans ses directions essentielles, et Madrid était en communication avec Santander d’un côté par le chemin d’Alar del Rey, et de l’autre avec la frontière française à Irun par la section de Vittoria. Par là se trouvaient desservies les provinces de l’ouest de l’Espagne et toutes ces villes, Madrid, Avila, Médina, Valladolid, Palencia, Santander, Burgos, Vittoria, Tolosa, Saint-Sébastien, qui devaient offrir de brillans élémens de trafic, formant à travers les Castilles et les provinces basques une ligne ininterrompue jusqu’à la frontière de France. En même temps le gouvernement, qui voulait voir toutes les provinces dotées du nouvel élément de prospérité, concédait la ligne de Madrid à Saragosse et ordonnait une étude sérieuse du chemin de fer de Saragosse à Pampelune, espérant ainsi satisfaire les provinces de l’est. Malheureusement cette ligne sans issue propre était loin de répondre à tous les besoins. L’Aragon et la Navarre, se voyant ou croyant se voir sacrifiés, se jetèrent hardiment dans la lutte, opposant la traversée des Pyrénées par les Alduides à celle du Guipuzcoa. Battus à plusieurs reprises, leurs députés tournaient la question en tous les

  1. Voici les époques et l’importance de ces concessions :
    1856 23 février Valladolid à Burgos 121 kilom.
    185618 juin San-Isidro à Alar del Rey 100
    1856 21 octobre Madrid à Valladolid 239
    1856 « Burgos à Irun 262
    Total 722 kilom.