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encore. En Italie, l’événement le plus impatiemment attendu, c’est la reconnaissance du nouveau royaume par la France. On dit que le ministère piémontais attend cet acte de la France pour émettre son grand emprunt. Le marché français ne sera probablement ouvert à l’emprunt italien que si le royaume d’Italie a été préalablement reconnu. Il serait fâcheux que le concours des capitaux français vînt à manquer à cette opération, parce que la formalité de la reconnaissance n’aurait pas été remplie. On assure que, par suite de difficultés que le ministre de Turin à Francfort aurait rencontrées dans ses rapports avec les représentans de la Bavière, du Wurtemberg et du Mecklembourg, l’exequatur serait retiré aux consuls de ces états en Italie. Il n’y a rien de nouveau dans la position des affaires à Naples. C’est le propre d’un pays tel que les Deux-Siciles, où tout a été décomposé par un mauvais gouvernement et où ce gouvernement a été renversé lui-même par une révolution, d’user beaucoup d’hommes et d’administrations avant de reprendre son équilibre. C’est ce que fait comprendre l’intéressant rapport de M. Nigra sur la lieutenance du prince de Carignan, et c’est aussi ce qui explique que le prince et son habile secrétaire-général ont eu raison de se retirer pour faire place à d’autres personnes et à d’autres systèmes. M. Ponza de San-Martino paraît débuter à Naples avec une énergie qui hâtera, nous l’espérons, la pacification de ce pays.

En Hongrie, le langage continue à être violent, mais la violence continue aussi à ne point dépasser le domaine de la parole. Après les traitemens que les Hongrois ont subis pendant douze ans, et avec leur goût pour les exhibitions oratoires, on devait s’attendre à ce qui arrive aujourd’hui : le premier usage qu’ils devaient faire de la parole qui leur était rendue, c’était de dresser la liste de leurs griefs, d’épuiser le catalogue des récriminations, d’exhaler des colères et des plaintes trop longtemps contenues. L’Autriche doit se montrer patiente devant ce débordement de protestations et de vitupérations : c’est la moindre expiation qu’elle puisse faire de sa politique de 1849 ; c’est aussi la plus adroite tactique, car il n’est point improbable que les ressentimens de la Hongrie ne s’évaporent en partie dans ce torrent de harangues. L’adresse de M. Deak, au bout de cette interminable discussion qui occupe depuis plusieurs semaines la diète hongroise, sera sans doute votée ; mais ce vote même n’amènera point encore la rupture violente entre la diète et le cabinet autrichien. On entamera entre Vienne et Pesth une négociation nouvelle, et peut-être parviendra-t-on à s’entendre sur quelque expédient qui ne sera ni la simple union personnelle, ni l’entière centralisation parlementaire.

La question de l’abolition du droit sur le papier vient de donner lieu à une nouvelle lutte au sein de la chambre des communes. C’est la dernière épreuve décisive pour le budget de M. Gladstone. 281 voix ont voté pour l’amendement proposé par l’opposition, et 296 ont voté pour le ministère. Depuis la première épreuve, où la question fut posée à propos de l’abolition