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Bixio et interrompre par une marche rapide nos communications entre Naples et nos avant-postes. À Maddaloni, la lutte fut terrible ; enlevée par les troupes royales dans un premier moment de surprise, la position fut reconquise par Bixio ; le régiment qui servait de grand’garde à Ponte-della-Valle, et que commandait le colonel Dunyov, fut décimé ; Dunyov, resté au feu malgré une atroce blessure qui devait un mois après nécessiter l’amputation de la jambe gauche, tint ferme jusqu’au bout, et c’est peut-être grâce à sa fermeté que l’on doit d’avoir pu se maintenir à Maddaloni, d’où à midi les royaux étaient définitivement expulsés. À Sant’Angelo, on a vu que nous résistions, et que, tout en restant sur une défensive très accentuée, qui empêchait les royaux d’entamer nos positions, nous étions contraints cependant de ne faire aucun mouvement agressif. À Santa-Maria, le général Milbitz était forcé de restreindre la défense aux environs immédiats de la ville, et la journée pouvait rester indécise, peut-être même mal tourner pour nous, malgré le courage déployé sur toute la ligne, lorsque par l’ordre de Garibaldi la réserve cantonée à Caserte arriva sous le commandement du général Türr ; elle se composait de deux brigades, la brigade milanaise[1] et la brigade Eber. Le général Türr rencontra Garibaldi à Santa-Maria : « C’est presque fini, dit ce dernier, il n’y a plus qu’un coup de collier à donner ! » Türr se prit à sourire en répondant : « Alors dépêchons-nous de le donner. » Selon le récit d’un témoin oculaire, on ne pouvait « passer le nez » hors des portes de Santa-Maria, tant la mitraille napolitaine gardait la route. La brigade milanaise, sortie par la porte de Sant’Angelo, et les hussards hongrois, sortis par la porte de Capoue, prirent l’ennemi entre deux charges et firent du jour autour de Santa-Maria. à la tête de la brigade Eber, Garibaldi en voiture s’avança vers Sant’Angelo. Une décharge tua un cheval et le cocher. Garibaldi sauta à terre, et, appelant à lui la légion magyare et la compagnie suisse, se jeta sur les royaux en criant son nom ; le reste de la brigade Eber arrivait au pas de course. On enfonça les lignes ennemies, et nos communications furent rétablies entre Santa-Maria et Sant’Angelo. Toute notre armée alors, marchant en demi-cercle, refoula les royaux vers Capoue, qui sur eux ouvrit et referma ses portes à cinq heures. La bataille avait duré treize heures ; quarante neuf mille hommes y avaient pris part : quatorze mille de notre côté, trente-six mille du côté des royaux, de leur propre aveu. Pendant la journée, ils purent opérer trois changemens de lignes ; c’est ce qui nous causa tant de fatigues et retarda si longtemps la victoire. En tués, blessés, prisonniers, nous avions près de dix-huit cents

  1. Commandée, je crois, par le colonel Degiorgis.