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HO-NAN, CHAN-TONG, TCHI-LI. — Les régions situées au nord du Hou-pé et au-delà du Fleuve-Jaune n’ont pas vu flotter depuis 1854 les couleurs de Taï-ping-ouang ; mais la domination impériale ne s’y est pas exercée sans réserve : Les bandes insurgées qui occupaient Kao-tang, non loin des bords du Grand-Canal, ont été anéanties en 1854 par le prince Tsang-ki-lin-sin ; leur général Li-kaï-foun et les chefs qui commandaient sous ses ordres ont été faits prisonniers, conduits à Pékin, « condamnés à la mort lente et coupés en petits morceaux pour réjouir le cœur du peuple. » Cependant cette grande victoire, en achevant la destruction de l’armée rebelle qui avait pénétré jusqu’à Tiën-tsin, ne devait pas complètement pacifier le Chan-tong. En 1855, une insurrection locale avait éclaté au sud du Ho-nan. Ces nouveaux révoltés, qu’on appelait simplement les niefi[1], s’étaient emparés de plusieurs villes ; puis, remontant vers le nord, ils avaient franchi les frontières du Ngan-hoeï et du Riang-sou, passé le Fleuve-Jaune et donné probablement la main aux fuyards que chassaient devant eux les soldats victorieux de Tsang-ki-lin-sin. L’incendie signalait partout leur passage. Il fallut qu’un des généraux les plus expérimentés de l’empereur, Ho-tchoun, qui soutenait alors dans le Ngan-hoeï une lutte opiniâtre contre les armées de Taï-ping-ouang, laissât à ses subalternes la conduite des opérations militaires au centre de la province, et allât lui-même se mesurer avec les niefi. Il les atteignit près de Toung-ling, sur les frontières septentrionales du Ngan-hoeï, les défît complètement et en fit décapiter trois mille. Il n’est resté de la rébellion des niefi que de lamentables souvenirs et une misère affreuse dont les suites se font encore sentir.

Les excès commis en 1857 au sud de la province du Tchi-li et aux environs de Tien-tsin par des bandes isolées de brigands qui ont incendié quelques villages, pillé les prétoires et vidé les caisses publiques, ont eu pour les populations des conséquences moins désastreuses et moins durables. En 1858, la province était entièrement pacifiée. Comblé des faveurs impériales, honoré de toute la confiance de Hienn-foung, Tsang-ki-lin-sin put employer ses loisirs à exercer ses troupes, à fortifier le Peï-ho contre les barbares, à méditer cette suite de trahisons et de cruautés qui s’est terminée par l’humiliation de l’empire en 1860.

Pour achever ce récit, dont j’aurais épargné certainement au lecteur quelques détails un peu arides, si je n’avais voulu que cette étude fût sérieuse et complète, il me reste à raconter les événemens militaires qui se sont accomplis depuis 1853 dans le Kiang-sou, aux environs

  1. C’est-à-dire filous, voleurs.