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autant que possible le nombre des privilégiés et de forcer la petite noblesse à se confondre avec le tiers-état. Tel était le faible revenu que donnaient en Berri les plus grands domaines, tel était en même temps le nombre des terres seigneuriales possédées par des membres du tiers-état, que le corps des gentilshommes éligibles se trouvait par là réduit à 50 ou 60 pour toute la province ; chacun d’eux pouvait alors être appelé à son tour à faire partie de l’assemblée. Il avait été proposé, mais sans succès, d’affecter à perpétuité le droit de représentation aux douze principales terres de la province, comme en Languedoc. « Il nous a répugné, disait le rapporteur, de regarder comme un droit successif l’honneur d’être associé à l’administration publique ; l’idée de perpétuer ainsi les administrateurs a paru révoltante à plusieurs d’entre nous. »

Le clergé devait avoir pour représentans, outre l’archevêque de Bourges, six abbés réguliers ou commendataires, un chanoine de l’église métropolitaine et quatre chanoines des collégiales ; les prieurs et les curés étaient exclus comme n’ayant pas un intérêt suffisant à la bonne administration des biens ecclésiastiques. Les choix devaient être faits par l’assemblée elle-même. Le principe électif n’avait donc prévalu en réalité que pour le tiers-état.

Le projet de règlement fut rédigé en conséquence pour être soumis à l’approbation du roi. En même temps on régla la formation des bureaux, l’ordre des délibérations, la composition du bureau permanent ou commission intermédiaire. La disposition la plus remarquable portait que, lorsque l’assemblée en viendrait au vote, les opinions seraient prises par tête et en croisant les ordres, de telle sorte qu’un membre du clergé, un membre de la noblesse et deux membres du tiers-état opinassent toujours à la suite les uns des autres. Ce moyen de maintenir entre les ordres une jalouse égalité avait été emprunté par Necker aux états du Languedoc ; en l’insérant dans son règlement, l’assemblée du Berri ne fit que reproduire l’article 7 de l’arrêt du conseil qui l’avait instituée.

Le bureau des impôts présenta le second son travail ; il avait pour rapporteur l’abbé de Véri. Les impôts dont le roi avait spécialement confié l’examen à l’assemblée étaient la taillé, la capitation et les vingtièmes, c’est-à-dire les impôts directs, qui rapportaient ensemble dans la généralité 2,500,000 livres ; la taille proprement dite y figurait pour la moitié. « La répartition sur les contribuables, disait l’abbé de Véri, a été le plus important objet de nos recherches. Lorsque les collecteurs des tailles ont reçu le mandement de leur paroisse, ils n’ont d’autre règle pour la répartition que l’opinion qu’ils ont de la richesse des contribuables. Le rôle des années précédentes peut servir de guide, mais il ne fait pas loi. Tout dépend de l’opinion d’un appréciateur, et cet appréciateur change tous les ans.