Page:Revue des Deux Mondes - 1861 - tome 34.djvu/658

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lité des actions exercées entre les corps différens par leur nature.

Si l’on plonge une membrane animale dans une dissolution de sel marin, elle s’imbibe ; si on la retire ensuite, on enlève avec elle une portion du liquide. En répétant plusieurs fois la même opération, on obtient un résidu liquide plus chargé de sel que ne l’était la solution primitive. Cela veut dire que les membranes ont plus d’affinité pour l’eau que pour le sel, qu’elles absorbent et attirent celle-là, qu’elles exercent une moindre action sur celui-ci. Inversement, couvrons d’une couche de sel une membrane mouillée ; nous verrons bientôt le sel se fondre, parce qu’il attire l’eau et qu’il en enlève une partie au tissu. Il y a longtemps que les chimistes emploient un procédé économique pour obtenir de l’alcool concentré : il consiste à mettre de l’eau-de-vie dans une vessie qu’on suspend au milieu de l’air. La membrane attire et absorbe l’eau que contient l’eau-de-vie, et ensuite la répand en vapeur dans l’atmosphère. L’action se renouvelant sans cesse, on trouve, au bout de quelques jours, de l’alcool presque pur dans la vessie. Concluons de là qu’en général les substances poreuses ont une faculté élective en vertu de laquelle elles peuvent décomposer un liquide mélangé, en extraire certains principes, en repousser certains autres, et nous arrivons immédiatement à des conséquences importantes.

Nous arrivons à expliquer d’anciennes expériences par lesquelles Saussure a prouvé que les végétaux choisissent de préférence dans le sol certains liquides qu’ils absorbent, pendant qu’ils y laissent certains autres qui leur seraient nuisibles ; nous arrivons enfin à concevoir d’une manière générale l’action élective des glandes dans l’économie animale, puisque leur effet se réduit à enlever au sang des substances qu’il contenait, dont elles se débarrassent, et qu’elles apportent dans des canaux particuliers. En effet, en injectant dans les vaisseaux sanguins d’un animal vivant un mélange de différens sels, on trouve vingt ou vingt-cinq secondes après un de ces sels constamment dans les urines, un autre dans la salive.

On doit à Dutrochet des études suivies sur le rôle de ces affinités électives. Il appliquait à l’extrémité d’un tube de verre une plaque poreuse, par exemple une peau de vessie ; il remplissait ce tube avec un liquide déterminé, et il le plongeait dans un vase qui en contenait un autre. Ces deux liquides, séparés par la membrane, tendent à se mêler en la traversant, l’un dans un sens, l’autre dans une direction opposée. L’expérience prouve qu’ils le font en proportion inégale. Supposons qu’il y ait une dissolution sucrée dans le tube et de l’eau dans le vase : c’est celle-ci qui passera avec le plus d’abondance, et l’on verra le niveau s’élever peu à peu dans ce tube. Ces actions, que l’on appelle actions d’endosmose, résultent manifestement des attractions inégales exercées par la membrane