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40 livres sont descendues à 30, celles de 50 à 40, et ainsi de suite. Le propriétaire de la locature de 30 livres n’en retirant presque plus rien, il l’abolit. Voilà une famille éteinte ou sans emploi. Par suite de la répartition de la taille, qui n’a aucun égard aux facultés et au nombre des contribuables, le taux que rapportait cette locature se trouve reversé sur les autres, nouvelle surcharge dont elles n’avaient pas besoin. Après un certain laps de temps, le prix du sel étant encore augmenté de 10 livres par quintal, la locature ci-devant de 50 livres tombe à 30. Que fait-on ? On abolit encore cette locature. Autant de familles de moins, autant de nouveaux taux de taille qui se reversent sur le restant et achèvent de les accabler. L’impôt continue à croître et à agir. Le mal dans ses effets suit, comme la chute des corps graves, une progression accélérée. Les guerres et autres besoins publics ayant nécessité des accroissemens successifs sur la taille et ses accessoires, les augmentations ont toujours été réparties d’après les anciens rôles, de sorte que dans la plupart des paroisses de Sologne le taux de la taille est de 10 sols pour livre de revenu, tandis qu’il n’est ailleurs que de 3, 4 ou 5 sols. »

Un autre écrivain de la même époque, M. de Froberville, secrétaire perpétuel de l’académie d’Orléans, confirme ces assertions de M. d’Autroche et en ajoute d’autres. « Le système féodal, dit-il, avait fixé en Sologne chaque propriétaire sur ses terres. Dès que les expéditions militaires ne les occupèrent plus, ils donnèrent leurs soins à l’agriculture. Vers le milieu du XVIe siècle, les grands seigneurs commencèrent à s’y plaire moins ; ils se rapprochèrent de la cour, où la politique chercha à les fixer par des charges, par des bienfaits et par la galanterie. Les désordres des guerres civiles portèrent de nouvelles atteintes à la population de la Sologne. Les petits propriétaires, qui étaient nombreux, disparurent. La plupart des titres de nos biens-fonds, composés de pièces morcelées attestent cette vérité. »

On ne trouve nulle part, dans les procès-verbaux de l’assemblée provinciale, la preuve que Sieyès ait donné un concours actif à ses travaux. Il appartenait au bureau du bien public, et tous les rapports émanés de ce bureau sont de Lavoisier. Le futur auteur de la constitution de l’an VIII n’a jamais beaucoup aimé le détail et la pratique des affaires ; plus habile à inventer des systèmes de gouvernement qu’à les exécuter, son esprit n’était vraiment à l’aise que dans le vide. Il avait fait partie, avec l’abbé de Périgord, d’un nouveau groupe de fibres penseurs, qui avaient succédé, en Sorbonne, à Turgot et à ses amis, et il affectait déjà des airs de domination et un ton d’oracle. Il avait d’ailleurs, comme tous les hommes qui surnagent dans les révolutions, un sentiment très sûr de son intérêt personnel ; les labeurs obscurs d’une assemblée provinciale ne pouvaient donner que de la peine sans profit, et il évitait l’une autant