Page:Revue des Deux Mondes - 1861 - tome 34.djvu/957

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geur, par une succession de petites rivières, de lacs et de canaux, au-dessus du confluent du Thompson avec le Frazer. Il y a une façon fort curieuse de pénétrer au cœur de la Colombie anglaise : un steamer conduit le voyageur par la rivière Colombia jusqu’aux Cascades, à la hauteur du 48e degré ; puis de là, par les vallées des rivières Okanagan et Simil-Kameen, il rejoint celle du Thompson. La facilité des communications par eau est une des grandes faveurs que la nature ait accordées à la Colombie. Les principaux affluens du Frazer, outre le Thompson et le Harrisson, sont, sur la rive gauche, l’Axe et le Quesnel ; le Salmon et le Chilcolin se jettent à la rive droite. Presque tout ce vaste bassin est aurifère.

C’est seulement en 1858 qu’a commencé l’exploitation des mines d’or de la Colombie ; cependant déjà il était arrivé à plusieurs reprises que des Indiens fissent quelques trouvailles importantes. L’or est peu considérable à l’embouchure des rivières : on en trouve davantage à mesure qu’on les remonte ; d’ordinaire on le rencontre en petites parcelles ; dans certains endroits, il n’est pas assez abondant pour payer la peine du mineur ; il en a été ainsi à Colville. Au voisinage de Fort-Thompson et des lacs Kamloops et Shoushwap, sur le cours moyen de la rivière Thompson, les profits ont commencé à être plus considérables ; puis Yalé et Bridge-River sont devenus les principaux centres d’attraction ; enfin les chercheurs ont remonté le Frazer jusqu’aux forts Alexandria et George, et ils ont découvert que c’était dans les échancrures des montagnes d’où sort Quesnel-River que l’or se présentait le plus fréquent, le plus massif, et que là se rencontreraient les meilleurs profits. En effet quelques mineurs réalisèrent tout d’abord de beaux bénéfices, et l’on en cita plusieurs qui, dans la saison, amassèrent 4 ou 500 livres d’or.

La nouvelle de la découverte de cette région de l’or ne fut pas longue à se répandre ; la Californie l’apprit la première, et aussitôt un flot de trente-cinq mille mineurs déborda de San-Francisco sur Victoria de Vancouver. Cette invasion de tous les déçus et de tous les vagabonds de la Californie pouvait changer radicalement les destinées de la région du Frazer et lui créer des conditions toutes différentes de la vie paisible et réglée dont elle jouit ; mais la foule mal préparée qui se jetait sur elle n’y trouva pas de ressources : à Victoria, les moyens d’existence étaient insuffisans ; le continent présentait de vastes espaces déserts, à peine des routes et pas de chariots pour mener aux mines ; cette foule repartit comme elle était venue. La presse locale déplora cet abandon ; elle regrettait la population qui eût été ainsi tout d’un coup répandue sur la colonie, ainsi que l’expérience des mineurs californiens, sans comprendre que cette multitude, dénuée de ressources immédiates, apportait le désordre.