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obtenu de l’Angleterre qu’elle reconnût que, pour être obligatoires, les blocus doivent être effectifs, c’est-à-dire maintenus par uns force suffisante pour interdire réellement l’accès du littoral de l’ennemi. La preuve que ce n’est pas assez est fournie par beaucoup de traités qui renferment des stipulation plus précises, des garanties plus complètes, car qui sera juge de l’efficacité du blocus, si ce n’est le belligérant, et qu’est-ce qui l’empochera de trouver suffisante une force dérisoire ? A la rigueur, on peut soutenir qu’un seul petit navire armé est en état d’interdire l’accès d’un port à toute une flotte de vaisseaux marchands. N’a-t-on pas vu de simples barques montées par de hardis corsaires s’emparer des galions de l’Espagne et des east-indiamen de l’Angleterre ? Il faut donc, pour que des stipulations de ce genre aient quelque valeur, s’expliquer plus clairement sur tout ce qui a soulevé des litiges dans le passé et ne manquerait pas d’en soulever de nouveaux. Il faut dire à quelles conditions la force navale destinée à maintenir le blocus sera reconnue propre à le faire respecter ; il faut fixer, comme l’ont fait certains traités, le nombre minimum de vaisseaux et de canons ; il faut stipuler que ces vaisseaux doivent être présens, arrêtés devant le port bloqué, ou naviguant sans s’en éloigner de manière à en fermer efficacement l’entrée. Il ne faut pas qu’un simple aviso courant des bordées devant une côte prétende interdire au monde entier tel commerce d’où peuvent dépendre le bien-être et parfois l’existence de millions d’hommes. Je vais même plus loin : la validité du blocus devrait dépendre d’une attaque simultanée par terre ; c’est là du moins un but à poursuivre, si on ne peut l’atteindre. Une place ne serait considérée comme bloquée que lorsqu’elle serait assiégée ou tout au moins investie. Cette opinion, que j’ai entendu défendre par de hautes autorités, s’appuie sur de justes et fortes raisons. Pour imposer aux neutres des sacrifices aussi grands que ceux qu’entraîne parfois le respect du blocus, le belligérant doit prouver la nécessité de ces sacrifices ; or la nécessité n’existe pas lorsque le port bloqué, n’étant pas investi, peut recevoir par terre ce que la mer ne lui apporte pas. Il arriverait un jour ou l’autre, avec le système actuel, qu’un assaillant incapable de maintenir un soldat sur le territoire ennemi en interdirait l’accès par mer au moyen de quelques vaisseaux, empêcherait le commerce maritime des neutres, tandis qu’un voisin enverrait sans obstacles, par routes, fleuves, canaux ou chemins de fer, les produits de son sol et de son industrie jusque sur les quais d’une ville ouverte à tous du côté de terre, et dont le port seul serait bloqué. C’est à peu près ce qui se passe pour la plupart des ports de l’Amérique du Sud ; mais l’anomalie serait encore plus frappante, si l’on prenait des