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pour longtemps, peut-être pour toujours. Ce sont là des pratiques que doit flétrir une réprobation universelle. Détruire des richesses qu’on ne peut s’approprier, c’est faire une guerre de sauvages ; piller et anéantir sans examen, sans vérification possible, des cargaisons dont tout ou partie peut appartenir à des neutres, et qui, à ce titre, devraient être inviolables, c’est agir en pirates. Plus condamnable encore est l’obstruction des ports, car ce n’est pas seulement la génération présente, ce sont les générations futures qu’on prive de leur patrimoine. Les ports, les fleuves que Dieu a donnés à l’univers pour faciliter les communications et les échanges sont un dépôt sacré fait à l’humanité tout entière, et que nul ne peut aliéner sans crime.

Les questions que soulève la réforme du droit maritime en 1862 sont grandes ; quelques-unes sont aussi vieilles que les premières sociétés ; il en est que de longs siècles de christianisme et de civilisation ont laissées telles que le paganisme et la barbarie les avaient léguées au moyen âge. Il faut enfin, d’un accord trop tardif, mais unanime, mettre un terme à ces misères et à ces hontes. De nombreux congrès ont délibéré sur de moindres intérêts ; il est temps qu’un congrès spécial réunisse les représentans de toutes les nations civilisées du monde chargés de concourir à cette noble entreprise. Le gouvernement qui attachera son nom à l’initiative d’une semblable réforme acquerra une gloire moins éclatante peut-être, mais aussi durable et plus utile que celle des champs de bataille.


CASIMIR PERIER.