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remarquables. La population britannique doit augmenter de mille âmes quotidiennement. D’un autre côté, le paupérisme a diminué constamment et rapidement. À quoi attribuer un résultat aussi satisfaisant, si ce n’est à notre free trade, qui a décuplé à la fois le comfort de nos basses classes et la richesse nationale ? » Cette idée, souvent exprimée chez nos voisins, recevait, il y a peu de jours, une publicité retentissante. En analysant le Registrar general, recueil publié par les commissaires qui ont charge d’enregistrer les naissances et les décès, le Times établissait qu’en 1859 la France, avec une population plus nombreuse d’un sixième, avait eu moins de naissances et beaucoup plus de morts[1] que les trois royaumes, qu’en définitive la population britannique s’était accrue de 373,650 âmes, tandis que la France n’en avait gagné que 38,563. Les commissaires du Registrar general ajoutaient ce commentaire : « La salubrité du sol et du climat de la France est indiscutable, et par elles-mêmes les occupations agricoles sont favorables à la santé ; mais jusqu’à présent l’industrie a été paralysée dans les villes par le système protecteur, et dans les campagnes les ressources sanitaires font généralement défaut. » En effet, la stagnation de 1859 paraît avoir été occasionnée bien moins par les pertes de la guerre d’Italie que par des épidémies très intenses qui ont frappé beaucoup d’enfans dans nos campagnes.

Bien que le peuplement rapide d’un pays ne soit pas toujours la preuve d’un bon état social, je serais surpris si le rapprochement que je viens d’établir ne suscitait pas tout d’abord une présomption en faveur de l’Angleterre. Poursuivons le parallèle dans les diverses directions.


FINANCES. — A la fin de 1815, la nation anglaise fléchissait sous le poids de sa dette, et l’Europe s’attendait à quelque catastrophe financière. Le capital emprunté s’élevait à 21 milliards 526 millions de francs, et l’intérêt à payer annuellement dépassait 816 millions. Amoindrir ce fardeau a été considéré par tout homme d’état comme la partie importante de sa tâche. D’heureuses réductions d’intérêt,

  1. Voir le Times du 18 octobre 1801. — Voici d’ailleurs l’exposé comparatif pour l’année 1859 :
    Naissances Décès Accroissement de la population
    Angleterre, Écosse, Irlande 1,034,821 661,171 373,650
    France 1,017,868 979,383 38,563


    Pour une comparaison rigoureusement exacte, il y aurait à tenir compte, d’une part, de la guerre d’Italie soutenue par la France, et, d’autre part, des pertes que l’Angleterre a pu subir dans l’Inde, ou par les émigrations volontaires.