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et établissemens publics, de la caisse des dépôts et consignations, de la caisse d’épargne, avances des receveurs-généraux, cautionnemens en numéraire. Ces prêts, ces dépôts, non exigibles à courte échéance, ou qui se reproduisent et se succèdent d’une manière à peu près normale, sauf dans les grandes crises, forment, si l’on peut s’exprimer ainsi, la portion fondée de la dette flottante. Cette portion de la dette ne peut pas ne pas exister. La partie mobile est destinée à garantir le service de trésorerie ; elle s’alimente au moyen des bons du trésor, des traites du caissier central sur lui-même, des comptes-courans avec des établissemens de crédit, etc. Il y a inconvénient, il peut y avoir gêne et dommage, quand cette portion exigible devient assez considérable pour que, dans un moment de crise, le trésor soit exposé à manquer à ses engagemens, ou qu’il ne puisse se libérer que par un recours immédiat et onéreux à un crédit qui fait payer ses services d’autant plus cher que le besoin s’en fait plus vivement sentir.

Ce serait donc en lui-même un inconvénient passager que l’élévation de la dette flottante, si l’on avait la facilité de l’emprunt en rentes, comme l’avait en novembre 1847 un gouvernement qui en dix-huit années n’avait pas ajouté 12 millions de rentes à la dette consolidée. — Il en serait de même, si à défaut d’emprunt on annonçait l’intention de réduire les dépenses de façon à appliquer des excédans de recettes à l’extinction successive de la dette du trésor. Malheureusement aucun de ces deux remèdes ne semble devoir être employé. Le gouvernement pense (et personne ne le blâmera) qu’il a beaucoup emprunté, et quant aux économies M. le ministre des finances ne peut nous en promettre, bien que personne ne doute qu’il en ait souhaité. Eh bien ! malgré tout, je dirai encore qu’il faut presque se réjouir que le chiffre des découverts ait donné l’éveil, puisque ces découverts sont certainement pour beaucoup dans la pensée première d’une tentative de réforme financière.

M. Fould ayant résolu de réduire la dette flottante, trois moyens s’offraient à lui : l’économie, l’impôt, l’emprunt.

L’économie ne lui semble probablement pas praticable ; l’impôt doit faire face à l’insuffisance des recettes ordinaires et aux nécessités du budget extraordinaire : il a donc recours à l’emprunt, car la conversion facultative, telle qu’elle est offerte aux rentiers, n’est qu’une forme assez onéreuse de l’emprunt. L’état dit à ses créanciers[1] : Je vous dois 173 millions de rentes annuelles en 4 1/2 pour

  1. Afin de simplifier les calculs, je ne m’occupe que du 4 1/2 pour 100, et je passe sous silence les 2,335,052 fr. de rentes 4 pour 100. Je laisse également en dehors les obligations trentenaires, dont la création fut l’objet d’une vive controverse ; les orateurs officiels la soutinrent avec ardeur. M. le président du conseil d’état, dans la discussion sur le projet de conversion, a dit au corps législatif que le gouvernement n’entendait pas condamner ce qu’il avait si récemment défendu ; à ses yeux, la suppression n’est pas une condamnation. Émission coûteuse, conversion plus coûteuse encore, telle est en deux mots l’histoire de cette courte et malencontreuse création.