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timent d’horreur et d’indignation se répandit parmi les créoles, dont beaucoup avaient été égorgés en même temps que les Espagnols dans le sac de Guanaxuato. Ce fut le point de départ d’une division parmi les forces qui aspiraient à l’établissement de l’indépendance. Une partie des créoles, les plus riches et les plus influens, firent dès lors cause commune avec les Espagnols, et contribuèrent de leur épée aux désastres qu’après quelque temps éprouva la cause de l’indépendance.

À plus forte raison, après que le bâtiment de l’Alhondiga eut été emporté, tout ce qu’on put atteindre des richesses de la population espagnole de Guanaxuato fut confisqué au profit de l’insurrection ; mais ce ne fut pas une ressource pour la caisse de l’armée de Hidalgo. Presque tout ce butin fut la proie du pillage. Dans l’intérieur de l’Alhondiga seulement, il y avait en métaux précieux et en bijoux une valeur de 16 millions de francs.

L’enlèvement d’une cité aussi importante démontra à tous les yeux que l’insurrection était puissante et formidable. Après s’être emparé de Valladolid, autre grande ville dont la conquête suivit immédiatement celle de Guanaxuato, Hidalgo marcha fièrement sur la capitale, où il n’ignorait pas que l’indépendance avait beaucoup de partisans. Le 28 octobre 1810 il était à Toluca, à douze lieues de Mexico. Il remporta sur les troupes qui combattaient pour la métropole une victoire très chèrement achetée, à Las Cruces, et s’avança jusqu’en vue de la capitale ; mais il ne jugea pas qu’avec ses troupes indisciplinées il fût possible de s’en emparer. Ce n’était plus comme Guanaxuato ou Valladolid, qu’il avait surprises sans qu’elles eussent des forces militaires pour se défendre. Il reconnut qu’il n’y avait pas lieu d’espérer qu’une révolution accomplie par les habitans le rendît maître de Mexico, à cause des troupes accumulées dans la capitale, qui restaient fermes et qui contenaient la population. Il se résigna donc à se retirer vers l’intérieur. Dans ce mouvement de retraite, il fut battu à Aculco, où les régimens créoles de l’armée espagnole montrèrent de la résolution en faveur de leur drapeau. Des plaines d’Aculco, Hidalgo, vaincu, mais non abattu, se retira vers le nord, fit une entrée triomphale à Guadalaxara, où il devait souiller son nom par de nouveaux massacres. Il se fortifia ensuite au pont de Calderon avec les canons que ses lieutenans avaient pris dans les ports du littoral du Pacifique, particulièrement dans l’arsenal de San-Blas, et il y attendit l’armée qui tenait la campagne pour la métropole. La victoire se déclara pour les Espagnols, que commandait Calleja, le même qui avait gagné la bataille d’Aculco. Cette fois la défaite fut une déroute. Les chefs des insurgés avec les débris de leur armée se dirigèrent à marches forcées vers la frontière