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en conquérant au régime constitutionnel le plus beau fleuron de sa couronne d’outre-mer, le Mexique. Renouvelant la tentative de Fernand Cortez, il vint débarquer le 15 avril 1817 dans un petit port du nord, avec une poignée d’aventuriers de toutes les nations, et obtint d’abord des succès merveilleux; mais, coupé dans ses communications avec la mer, peu appuyé par les chefs indépendans qu’il avait rejoints à travers deux cents lieues d’un pays occupé par les Espagnols, il n’eut bientôt plus de ressource que dans l’excès de la témérité, et tenta le coup désespéré de s’emparer de Guanaxuato par surprise avec une petite troupe. Malheureusement il ne lui restait plus que cinquante de ses intrépides compagnons de débarquement. Repoussé dans cette attaque, il fut réduit à fuir, suivi de trois ou quatre hommes à peine, et fut pris dans un rancho (petite habitation rurale), où il venait de se reposer, le 27 octobre. Il fut fusillé quelques jours après. Orrantia, l’officier espagnol à qui était échue la bonne fortune de le prendre, eut, quand on le lui amena, la lâcheté de le frapper du plat de son épée et de le mettre aux fers. Le jeune Mina n’avait que vingt-huit ans quand il fut exécuté.


V.

Une révolution mise en marche par les causes que nous avons signalées avait nécessairement pour objet de secouer le joug d’une métropole égoïste et oppressive. L’indépendance était l’idée fixe des insurgés, la haine des Gachupines était la passion qui enflammait leurs cœurs et soutenait leurs bras. Quant à savoir quelle serait la forme du gouvernement une fois l’indépendance constituée, c’est une question qui demeurait dans l’ombre ou sur le. second plan. La majeure partie des insurgés ne songeait guère à s’écarter du système monarchique, auquel on était habitué; mais on n’avait pas le moyen de l’organiser. Il fallait cependant un gouvernement dans lequel l’élément civil eût au moins sa part, et qui, au lieu de suivre l’armée comme une partie des bagages, fut à résidence fixe dans une ville. Les chefs militaires le sentirent bientôt. Dès 1811 une junte de gouvernement (junta de gobierno) fut installée dans la ville de Zitacuaro, province de Valladolid, par les soins du général Rayon, qui commandait une des principales bandes après le désastre de Hidalgo. Elle fut composée d’abord de trois et puis de cinq membres, qui s’étaient à peu près élus eux-mêmes; mais il était entendu qu’elle devrait aussitôt que possible céder la place à une assemblée choisie par tout le pays, autant que ce serait praticable. Le général Rayon s’était placé à la tête de la junte.

L’attitude de ce fantôme de gouvernement fut aussi modérée