Page:Revue des Deux Mondes - 1862 - tome 38.djvu/884

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

gauche de la ligne de l’équateur, limitée au nord et au midi par les tropiques, à laquelle jadis on avait donné le nom de zone torride, parce qu’on supposait que par l’ardeur de sa température elle était à peu près inhabitable pour l’homme. Cette zone en effet, lorsque les terres y sont peu élevées au-dessus du niveau de l’Océan, présente, à côté d’une végétation luxuriante, une telle chaleur que l’homme de la race blanche n’y résiste pas à un labeur pénible, et que pour y vivre il est dans l’obligation de s’enfermer dans l’inaction, de se tenir abrité presque constamment entre d’épaisses murailles et de faire exécuter tout travail de force, particulièrement le labeur qui se doit accomplir à la face du soleil, par une race mieux constituée pour en affronter les rayons dévorans. Encore dans les îles le voisinage de la mer tempère de diverses façons l’influence brûlante du roi des astres. Lorsqu’au contraire la superficie des terres se présente sur la vaste dimension des continens, la chaleur sévit dans la plénitude de sa redoutable puissance, à moins d’une configuration particulière que la Providence s’est plu à accorder au territoire mexicain dans une mesure qui semblerait indiquer une prédilection : je veux dire à moins d’une grande altitude[1]. Plus son altitude est prononcée, plus la température moyenne d’un pays s’atténue, comme s’il s’éloignait de l’équateur pour se rapprocher du pôle, à ce point que, si l’altitude devenait extrêmement considérable, on rencontrerait sous la ligne même les glaces éternelles et une température moyenne pareille à celle de l’Islande ou du Groenland.

La grande masse du territoire mexicain, au lieu de ne présenter qu’un petit relief par rapport au niveau de la mer, comme les rives du Niger ou du Sénégal en Afrique, ou comme celles de l’Amazone dans l’Amérique du Sud, constitue un plateau fort exhaussé, que sur chacun de ses flancs un plan incliné à pente rapide rattache au rivage de l’Océan, ici l’Atlantique, là le Pacifique. Ce n’est pas le moindre privilège du plateau mexicain de se tenir dans les hauteurs qui sont le plus favorables pour que la race européenne y prospère, s’y entoure des cultures qu’elle aime et des industries où elle excelle, et y vive dans les conditions les meilleures pour sa santé et pour l’exercice de ses facultés en tout genre. C’est pour cela que, même avant l’arrivée des Espagnols, ce beau plateau, alors appelé du nom d’Anahuac, qu’ont essayé de restituer au territoire national les Mexicains indépendans, était le siège d’une civilisation remarquable, sous l’autorité du prince et de l’aristocratie militaire et religieuse des Aztèques. Le plateau mexicain est l’épanouissement de

  1. C’est le mot par lequel s’indique l’élévation du sol au-dessus du niveau de la mer, idéalement prolongée sur toute l’étendue du globe terrestre.