Page:Revue des Deux Mondes - 1862 - tome 39.djvu/580

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

les dépenses ; c’est là que se concentre aujourd’hui presque tout le mouvement des affaires et que se forment et se dessinent les grands talens politiques et oratoires. Avec leurs attributions diverses et distinctes, la chambre des lords et celle des communes constituent le parlement, qui, dans son omnipotence et sa liberté, est à la fois la sauvegarde, la direction suprême et l’orgueil de l’Angleterre.

Par le choix des représentans de la nation, par le pouvoir qui est dans les mains des grands propriétaires du pays, par la continuelle discussion de toutes les questions intérieures ou extérieures au parlement, la publicité complète de ces discussions, les classes élevées et les classes moyennes de la nation ont une influence réelle sur la direction des affaires, un contrôle effectif sur les gouvernans, et pèsent d’un grand poids dans le choix des organes et des serviteurs de la puissance publique. Le dernier des citoyens anglais ne saurait être opprimé sans que l’acte injuste dont il serait victime fût connu de quiconque peut lire un journal et du parlement, qui est toujours prêt, en dehors même de la marche régulière des affaires, à recevoir les pétitions du peuple et les plaintes des individus. La constitution exige avant tout que, pour chacun des actes de la couronne ou du ministère, il y ait un conseiller et un agent responsable, de sorte que, depuis le premier ministre jusqu’au dernier des fonctionnaires, tous soient exposés à être poursuivis devant les tribunaux ou les chambres pour tout acte inconstitutionnel ou coupable.

Les parlemens ont gouverné l’Angleterre avec une grandeur et une énergie que n’a surpassées nulle part ailleurs aucune autre forme de pouvoir.


« N’a-t-on pas vu (nous laissons parler lord Brougham) les immenses armées de terre et de mer que mit sur pied à différentes époques notre population peu nombreuse ? Que l’on compte nos établissemens si multipliés et si divers sur les points les plus reculés du globe ; qu’on suppute les centaines de millions qui ont été levées sur la nation pendant les cent cinquante dernières années, presque sans aucune opposition, et qu’on avoue alors que, pour fonder un gouvernement fort, il n’y a rien de tel qu’une constitution populaire, et qu’aucun despote, quelque absolu qu’il soit, n’a jamais eu dans sa main une machine à imposition qui vaille un parlement.

« Qu’on ne prétende pas que le peuple américain pourrait aussi bien que nous faire appel aux ressources du pays, car je doute fort que les représentans ou le président des États-Unis, après l’expiration des trois premières années de leur pouvoir, aient assez d’influence et d’autorité pour faire peser sur le pays, comme notre parlement l’a fait si souvent, de lourdes taxes de consommation, et surtout l’écrasant impôt sur le revenu. Je suis convaincu qu’en cas de guerre le fardeau de charges aussi accablantes amènerait rapidement la fin des hostilités sans que le pays se montrât bien difficile sur les conditions de la paix. Le peuple anglais au contraire est