Page:Revue des Deux Mondes - 1862 - tome 40.djvu/103

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

trouve que le canon rayé de 30, no 1, lance son boulet plein dit ogivo-cylindrique, et à la charge de 3 kilogrammes 1/2, avec une vitesse initiale de 324 mètres, inférieure par suite de la différence de la charge à la vitesse initiale des canons-obusiers ou des canons ordinaires, mais qui ne se trouve réduite qu’à 300 mètres à la distance de 360 mètres, à 284, à 251, à 228, à 209, à 199, à 188, à 178, à 167, à 155 enfin aux distances de 1,000, 2,000, 3,000, 4,500, 5,000, 5,500, 6,000 et 6,150 mètres. L’avantage est, comme on le voit, très considérable pour le canon rayé. Sans parler de la portée, la puissance de pénétration, représentée par la vitesse des projectiles, croît énormément plus, ou, si on l’aime mieux, décroît infiniment moins que celle des projectiles ordinaires. En d’autres termes, les boulets ogivaux de 30 kilogrammes et du calibre de 30, lancés avec des vitesses initiales de 374 mètres, ont à 300 mètres une force vive au moins égale à celle des boulets sphériques et pleins de 50 du poids de 25 kilogrammes, et tirés à la charge de 8 kilogrammes.

Des études déjà faites, il semble résulter, comme une donnée acquise à la science, que les boulets ogivaux éprouvent de la part de l’air une résistance tout au plus égale à la moitié de celle qui retarde dans sa course un boulet sphérique de même poids, de même diamètre, et animé au départ de la même vitesse initiale. Cette résistance, pour les projectiles ogivaux du canon rayé de 30, est considérée comme proportionnelle au cube de la vitesse.

La forme du projectile étant acceptée avec les conséquences qu’elle entraîne pour la bouche à feu, la question véritablement importante est donc d’augmenter les vitesses, autant que faire se peut, par l’augmentation des charges de poudre que la pièce peut supporter avec sécurité et en restant maniable. C’est ce qu’on a obtenu en France, au moins dans de certaines limites. Les pièces dites de 30, qui sont aujourd’hui en service à bord de la Gloire, lancent, à la charge de 7 kilogrammes 1/2, des projectiles du poids de 45 kilogrammes qui percent les plaques des cuirasses, mais à la distance d’une quarantaine de mètres seulement. Nous pourrions cependant être assez fiers de ces pièces, car elles sont encore, parmi celles qu’emploient toutes les marines du monde, les seules qui aient donné de pareils résultats ; mais nous avons fait mieux encore. Des pièces qui ont été expérimentées pendant l’été de 1861 ont produit, avec des charges de 12 kilogrammes de poudre, des résultats beaucoup plus considérables : elles ont traversé les plaques de 12 centimètres à 1,000 mètres de distance, sans que l’expérience ait jamais manqué toutes les fois qu’elle a été faite dans ces conditions. C’était un fait consommé dès le mois d’août 1861 ; aussi avons-nous été