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toutes les salines du royaume ne sont pas encore en état d’exploitation.

Les faits que nous venons d’exposer expliquent d’eux-mêmes comment le gouvernement grec, accablé dès la première année de son installation par des exigences désastreuses, servi par des agens administratifs dont rien ne lui pouvait garantir la scrupuleuse honnêteté, a dû se trouver dans l’obligation de recourir à la bienveillance intéressée des banques étrangères, et comment il lui eût été jusqu’ici fort difficile de satisfaire complètement à ses créances. Le 1er janvier 1822, l’assemblée nationale d’Épidaure proclamait ce principe tristement fécond, que le pouvoir exécutif avait le droit d’hypothéquer le domaine public, et elle se hâtait d’en inaugurer l’application par un emprunt de 5 millions de piastres. Une fois engagés sur cette pente funeste, les pouvoirs qui ont successivement gouverné la Grèce ne s’arrêteront plus. Les banquiers de Londres leur feront des prêts de 800,000 livres sterling en 1823, et de 2 millions en 1825, à des conditions tellement onéreuses, que 920,000 livres seulement viendront soulager la pénurie du trésor. En 1832, la Grèce demandera 60 millions de francs, par l’intermédiaire de la Bavière, aux puissances qui l’ont affranchie. Plus tard elle acceptera, à titre d’avances, 2 millions de florins de la Bavière elle-même. Ses gouvernemens n’ont fait que de rares et stériles tentatives pour se libérer des lourdes obligations qui grèvent ses finances. Capo-d’Istria a prétendu que les précédens congrès s’étaient arrogé, en imposant à l’état des charges aussi pesantes et aussi peu productives, un droit qui ne pouvait leur appartenir. Les titres qui constituent les emprunts de Londres ont été relégués dans les cartons du ministère des finances où ils dorment encore sous le nom de dettes différées. A partir de 1845, la Bavière, qui devait être remboursée en dix ans, ne reçoit plus rien de la Grèce, et elle est aujourd’hui sa créancière pour une somme qui dépasse sensiblement, à cause de l’interruption des intérêts, la totalité de ses avances. Enfin, et c’est là le point capital sur lequel s’est fixée l’attention des commissaires, les informations puisées à Paris au ministère des finances et fournies par l’administration hellénique elle-même permettent de constater qu’au 1er mars 1870 les sacrifices annuels des puissances auront complètement désintéressé, en capital et intérêts, la maison Rothschild, par laquelle a été souscrit l’emprunt des 60 millions, mais qu’à cette époque la Grèce devra à la France près de 40 millions de francs, à l’Angleterre un peu plus de 40 millions, et environ 42 millions à la Russie, ce qui fait en tout plus de 121 millions de francs, somme vraiment énorme pour ses finances! Nous avons vu que, sans le secours de ses emprunts, elle n’aurait pu combler les déficit de ses budgets inté-