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des services qu’ils accomplissaient naguère avec leurs ressources particulières[1].

Faire apparaître en un seul document toute la fortune publique, la faire gérer par une seule méthode, la faire tenir dans une seule caisse, c’est de la centralisation au plus haut degré. Et l’esprit, s’il vous plaît, la conséquence finale de ces mesures si bien avisées ? Serait-ce là simplement un progrès de méthode, une amélioration de mécanisme ? Non pas, vraiment. Ces innovations touchent au fond des choses par un point capital où reparaît le communisme, et qui consiste en ceci : que l’état, réglant les dépenses des établissemens dont le budget se publie et se confond avec le sien, considère non leurs recettes, mais leurs besoins. Tel est le fait promis ou exprimé par cette centralisation. En voulez-vous la preuve ? Vous l’obtenez en comparant l’allocation de crédit dont jouissent ces établissemens au montant de leur dotation primitive. Pour la Légion d’honneur par exemple, les crédits alloués en 1862 excèdent de 8 millions au moins le montant de ce qui était sa dotation. Quant à l’université, qu’est-ce que la rente de 400,000 francs, qu’est-ce que le produit des droits à elle propres, qui étaient toute la donation impériale, auprès du chiffre sans cesse grossissant de son budget, qui dépasse aujourd’hui 15 millions ?

Je conviens que les communes et les départemens ont leur budget distinct, que du moins les recettes locales y sont affectées aux dépenses locales, et qu’il y a là l’apparence d’un cas où des besoins spéciaux ne sont satisfaits que dans la mesure de ressources également spéciales. N’allons pas croire toutefois que la centralisation ne soit pour rien dans l’organisation financière des localités.

Nous avons vu tout à l’heure le rôle du fonds commun ; or le fonds commun est en grande estime auprès de nos financiers : c’est le procédé dont ils usent le plus volontiers. Fonds de non-valeurs, fonds des pensions et indemnités des administrations centrales, fonds des chancelleries consulaires, fonds du cadastre, tout cela est au régime du fonds commun. Il est vrai que tout cela n’est guère important, si l’on regarde à la colonne des chiffres. Il y a un sens toutefois à cette abolition des caisses particulières, à cette réprobation des recettes profitables seulement, soit aux localités, soit aux individus qui les fournissent. Il y a là une entente de l’équité, qui est d’attribuer à chacun, non la part que lui fait le hasard des circonstances, mais celle que réclament ses besoins. Ajoutons qu’en

  1. Voyez article 4 du budget des dépenses de 1830, loi du 2 août 1829, — article 50 du budget des recettes de 1832, loi du 21 avril 1832, — article 19 de la loi du 24 août 1833 portant règlement définitif de l’exercice de 1830, — article 17 de la loi du 9 juillet 1836 portant règlement définitif de l’exercice 1833.