Page:Revue des Deux Mondes - 1862 - tome 41.djvu/398

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

se montrer trop difficile. Ému d’ailleurs par quelques catastrophes qui avaient çà et là profondément attristé les débuts de l’exploitation, le public se préoccupait de la sécurité beaucoup plus que du comfort. En fournissant les types des premières voitures, les Anglais ’étaient bornés à une imitation à peu près servile de nos anciennes diligences. Depuis lors, l’Europe en général ne s’est guère écartée de ces modèles.

En dehors de l’Europe, dans l’Amérique du Nord, l’esprit d’initiative s’était montré beaucoup plus hardi. On n’avait pas reculé devant des combinaisons vraiment originales. Chacun peut encore voir à Londres certains modèles très curieux venant de l’autre bord de l’Atlantique. On connaissait déjà le mode adopté des longtemps aux États-Unis, et qui consiste à établir une communication entre toutes les voitures composant un train au moyen d’un passage intérieur et de plates-formes entre les divers wagons. On savait aussi que certaines lignes possèdent pour les longs trajets des voitures avec des lits nommées wagons-dortoirs. Ce système s’améliore et se répand de plus en plus. Un modèle perfectionné en ce genre a été expédié à Londres par la compagnie canadienne du Great-Western railway. Chaque voiture est divisée en douze compartimens renfermant chacun quatre lits. La position de ces lits, qui laisse la facilité de les mouvoir en divers sens, les moyens de ventilation pendant l’été et de chauffage pendant l’hiver, comme aussi la place occupée par des salons aux deux extrémités du véhicule, y sont fort exactement figurés. Rien n’y manque de ce qui intéresse le service intérieur, et comme toujours une communication règne d’un véhicule à l’autre. Un autre modèle, celui d’un wagon ordinaire appartenant à la province du New-Brunswick, se fait remarquer par la disposition des sièges ayant la forme de sofas, avec deux places seulement, et adossés deux à deux dans la longueur du wagon, de manière à laisser aux voyageurs une complète indépendance de mouvement, une pleine liberté de circulation. À ces conditions, indépendance de mouvement, liberté de circulation, si vous ajoutez les aménagemens spéciaux pour les longs voyages, vous possédez les données essentielles du système en vigueur dans toute l’Amérique du Nord, et qui n’ont fait que passer de la république américaine dans les possessions britanniques. Par son aspect général comme par ses détails, dette organisation se ressent surtout des tendances intimes de la sociabilité des États-Unis, telles qu’on les avait observées avant la guerre actuelle ; par cette préoccupation excessive de l’indépendance individuelle, elle répond sans doute à des mœurs toutes spéciales, mais elle aboutit en fait à garantir aux voyageurs de précieux avantages.

De ce côté-ci de l’Océan, des facilités analogues, facilités si complètement ignorées jusqu’à ce jour, semblent devoir résulter, quoique