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dans cette assurance; les rancunes royales et féminines persistent sous les paroles gracieuses qui les couvrent. A part même cet incident, la situation de M. de Tillières comme ambassadeur était déjà fort ébranlée ; il était le client et l’ami du vieux chancelier de Sillery et de son fils le marquis de Puisieux, tous deux près d’être écartés des conseils de Louis XIII, et qui le furent en effet en février 1624 par l’influence du surintendant des finances, le marquis de La Vieuville, destiné à disparaître bientôt lui-même devant le cardinal de Richelieu, que le 26 avril 1624 il avait fait rentrer dans le conseil du roi, s’en promettant un appui auprès de Marie de Médicis, et qui l’en fit brusquement congédier le 12 août suivant, n’y voulant pas plus de voisin incommode qu’il n’y avait de rival sérieux. A la retraite du marquis de Puisieux, Antoine de Loménie, seigneur de La Ville aux Clercs, déjà son collègue comme secrétaire d’état, eut les affaires d’Angleterre dans son département, et le comte de Tillières, mécontent et affaibli, resta pourtant encore ambassadeur à Londres, chargé de suivre, sous les ordres de ministres qui n’étaient pas ses amis, la négociation matrimoniale qu’il n’avait pas été le premier à entamer.

Il avait reçu de Paris, avant même que lord Kensington y fut arrivé, des instructions qui, dans leur ferme brièveté, avaient dû lui faire pressentir, sinon dans les conseils publics, du moins à côté de Louis XIII, l’action d’un homme capable de concevoir et de poursuivre une résolution politique sans hésiter au gré des fluctuations de la pensée et des embarras de chaque jour. Dès le 17 février 1624, le secrétaire d’état nouvellement chargé des affaires d’Angleterre, M. de La Ville aux Clercs, écrivit au comte de Tillières : « Vous continuerez à embarquer le prince (de Galles) à désirer rompre avec l’Espagne, et vous le fortifierez par le duc de Buckingham, que ses intérêts y doivent porter, sans néanmoins faire rien qui puisse laisser aucun indice de vos conseils; ceux-là se peuvent donner sans vous engager à trop avec les Anglais, et sans les dégoûter par une retenue affectée. Votre prudence vous fera bien ménager, ainsi que vous avez commencé, ce que sa majesté désire, montrant au prince les avantages qu’il peut espérer de la France et de l’amitié des princes catholiques, et faisant sentir à ceux qui vous parlent que de deçà la raison seule gouverne, et que par elle, sans précipitation, tous les conseils seront pris avec dignité et gloire pour sa majesté et avantage pour ses alliés. »

Le cardinal de Richelieu n’était pas encore officiellement rentré à cette époque dans le conseil du roi; mais, par la nouvelle composition de ce conseil et par la reine-mère, son influence y prévalait déjà et en inspirait le langage comme la conduite.

Les rivaux de la France, les Espagnols, ne tardèrent pas à sentir