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cément disséminées avait eu depuis cinq jours à résister aux plus rudes assauts, et l’avait fait avec vigueur. Maintenant qu’elle était rassemblée tout entière sur les rampes de Malvern-Hill, il se pouvait que l’armée confédérée, également réunie, voulût tenter contre elle un dernier effort. Aussi le général Mac-Clellan prit-il pendant la nuit du 30 juin au 1er  juillet les dispositions nécessaires pour la bien recevoir. Il mit en batterie toute l’artillerie, au moins trois cents pièces, sur ces hauteurs, en la disposant de telle sorte qu’elle ne gênât pas le feu de l’infanterie le long de l’espèce de glacis que les assaillans auraient à gravir à découvert. Au feu de cette artillerie devaient se joindre les boulets de cent des canonnières qui, comme la veille, étaient chargées de flanquer la position. C’était folie que de se ruer contre de tels obstacles. Les confédérés cependant l’essayèrent. À plusieurs reprises, dans la journée du 1er  juillet, ils s’efforcèrent d’enlever Malvern-Hill, mais sans avoir un seul moment la chance de réussir. Cette journée ne fut pour eux qu’une inutile boucherie. Leurs pertes furent très considérables, celles des fédéraux insignifiantes. Ce succès tint à deux causes : d’abord à l’heureuse prévoyance du général, qui, en dépit de tous les obstacles opposés par la nature du sol à sa nombreuse artillerie, n’avait rien épargné pour la mener avec lui, et ensuite à la fermeté des troupes qu’il commandait. On ne fait pas une campagne comme celle qu’elles venaient de faire, on ne traverse pas une série d’épreuves comme celles qu’elles venaient de traverser, sans en sortir plus ou moins aguerri. Si leur organisation primitive eut été meilleure, les survivans de cette rude campagne, je ne crains pas de l’affirmer, eussent pu marcher de pair avec les premiers soldats du monde.

Le soir de ce dernier combat, l’ennemi épuisé se retira pour ne plus reparaître, et l’armée du Potomac alla prendre position et se reposer à Harrison’s-Bar, lieu choisi par ses ingénieurs et par la marine comme offrant des facilités plus grandes à la défense et à l’approvisionnement. La campagne contre Richmond était terminée, sans succès, non pas sans honneur. L’honneur était sauf ; mais ceux qui avaient compté sur le succès pour la prompte reconstruction de la grande Union américaine dans un élan de conciliation généreux et patriotique avaient vu leurs espérances malheureusement évanouies.


VI.

Je m’arrête ici. J’ai eu pour but, dans le cours de ce récit, de définir le caractère d’une armée américaine, de faire connaître les sin-