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magnifiques témoignages d’une influence romaine répandue jusqu’à l’extrémité nord du Danemark, et que jusqu’à présent on avait ignorée. Avant 1850, on n’avait fait dans cette voie que des découvertes peu considérables et isolées ; les dix années suivantes en apportèrent un grand nombre, parmi lesquelles celles des trois tourbières d’Allesoe, de Nydam et de Brarup sont d’une extrême importance. — Le marais d’Allesoe est situé un peu au nord-ouest de la petite ville d’Odense, en Fionie. Pendant plusieurs années, le Musée des antiquités du Nord avait reçu de cette localité un nombre considérable d’armes de fer, : des pointes de lances, des fragmens de javelots, de flèches, etc., et beaucoup de ces pièces portaient les traces évidentes des luttes où elles avaient servi et des coups qu’elles avaient reçus. On se détermina enfin à pratiquer des fouilles, et l’on trouva tout l’équipement d’une troupe armée, plus de deux cents pointes de lances une égale quantité de javelots, des débris de boucliers et de casques d’apparence romaine, l’appareil de la petite forge nécessaire en campagne, une enclume, des marteaux et des tenailles, les dés et les pions qui devaient servir aux jeux des soldats, tout cela travaillé avec un grand goût et quelquefois chargé de riches ornemens, les armes par exemple incrustées d’argent ou d’or. Les trouvailles de Nydam et de Brarup vinrent compléter celles d’Allesoe. Ici ce n’étaient plus seulement des pointes de lances et des javelots, ni même seulement des boucliers et des casques, mais des cottes de mailles, des vêtemens en drap, des chaussures, des fibules et des broches pour fixer les manteaux sur l’épaule droite, plusieurs des d’ambre, des équipemens complets pour les chevaux, des instrumens d’agriculture, une collection de vases pour la cuisine, etc. Le marais de Brarup avait admirablement conservé, les vêtemens, le cuir et le bois des lances, mais il avait détruit tout le fer, excepté de nombreux fragmens de cottes de mailles. Le marais de Nydam au contraire avait conservé même le fer, et comme les objets qu’on y avait trouvés étaient à peu près semblables à ceux de Brarup, les deux découvertes se complétaient, et le bruit se répandit qu’on venait de réunir l’équipement d’une armée romaine du me siècle après Jésus-Christ. Cette date précise était fournie par des monnaies romaines trouvées dans les deux dernières tourbières. À Brarup, ces monnaies allaient de l’an 60 à l’an 218 après Jésus-Christ ; celles de Nydam s’arrêtaient à l’année 220. Il était donc prouvé que le dépôt de tous ces objets n’était pas plus ancien que les années 218 et 220, et il était probable que les objets eux-mêmes n’étaient pas plus modernes.

La principale fouille à Nydam avait eu lieu pendant l’été de 1859 ; on vient de reprendre au mois d’août 1862 un pareil travail dans